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2008 : Patrimoine maritime, ressources et économies du littoral. Recherche, nouvelles compétences et nouveaux métiers de la mer > TR1 : Le patrimoine maritime bâti, témoin de l'évolution économique du littoral et des activités nouvelles >  Le croisement des données Terre / Mer : Litto3D®

Le croisement des données Terre / Mer : Litto3D®

Catherine Le Roux, SHOM

Biographie :

LE ROUX Catherine

Compte rendu :

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Transcription :

16 octobre 2008 Table ronde 1


Discours de Catherine Le Roux :


Sylvie Andreu : Catherine Le Roux, vous êtes ingénieur, vous avez mis au point Litto3D®, racontez-nous l’histoire de ce projet.

Catherine Le Roux : Je suis le chef du projet Litto3D®. Je ne vais pas parler de bâti, contrairement aux présentations précédentes, mais plutôt de ce qu’il y a dessous, c’est à dire le relief, qui permet de positionner de manière précise le bâti. Je vais présenter brièvement le projet dans son ensemble et décrire plus particulièrement la production qui est maintenant commencée.
C’est un projet qui concerne à la fois la mer et la terre et que le SHOM - Service Hydrographique et Océanographique de la Marine - mène en collaboration avec l’IGN - Institut Géographique National.
L’objectif de ce projet est de produire une modélisation altimétrique continue terre/mer du littoral qui donne une vision tridimensionnelle du littoral.
Evoquons rapidement le contexte : le littoral est un espace convoité à fort enjeu économique, mais il est également fragile, menacé, que se soit par l’érosion, les tsunamis, les tempêtes, parfois aussi les marées noires ; c’est d’ailleurs après les naufrages de l’Erika et du Prestige que l’Europe a vraiment pris conscience de l’importance du littoral et de sa protection, et a recommandé en 2002 aux états membres de procéder à l’inventaire détaillé du littoral.
En avril 2003, le comité ministériel de la mer a relayé cette recommandation et a prescrit au SHOM et à l’IGN de s’associer de manière à produire le Référentiel Géographique du Littoral, le RGL

Sylvie Andreu : Voilà l’origine du projet ?

Catherine Le Roux : Oui.
Ce projet doit répondre à de multiples besoins :
- délimitation maritime,
- protection du littoral, c’est-à-dire changement du trait de côte dû à l’érosion,
- protection de la faune, de la flore,
- prévention des risques, inondations, pollutions, sauvetage en mer, catastrophes naturelles,
- développement économique, portuaire, touristique ou industriel,
- exploitation des ressources, des minerais,
- études et recherches scientifiques,
- besoins militaires , surveillance côtière
- et Gestion Intégrée de la Zone Côtière (GIZC).

Sylvie Andreu : Vous m’avez parlé de 94 applications possibles…

Catherine Le Roux : Oui, 94 applications ont été recensées. Quelques applications plus précises ont été listées par une collectivité locale : gestion des plages, activités nautiques, développement de l’aquaculture, protection contre l’érosion du littoral, conception d’équipements portuaires, protection des espaces sensibles, aménagement du sentier du littoral, application de la loi littorale dans les documents d’urbanisme, établissement des plans de secours face aux phénomènes de submersion, et enfin exercice du pouvoir de police du maire .
Le SHOM et l’IGN, après concertation, ont souhaité apporter deux réponses ; une première réponse assez rapide à partir de l’existant, qu’on a baptisé Histolitt – pour historique et littoral. Mais les données existantes ne sont pas entièrement satisfaisantes. Nous avons donc besoin d'acquérir de nouvelles données plus denses et plus précises; ce sera l'objet de la 2ème phase qui vient de démarrer.
Nous avons commencé par construire un trait de côte commun, pour la partie maritime et la partie terrestre. Ce trait de côte au 25e/mille est visualisable sur les GÉOPORTAILS du SHOM et de l’IGN.
A partir justement de ce trait de côte commun il devient possible de fusionner les cartes existantes du SHOM et de l’IGN pour produire des cartes qui rassemblent toutes les informations existantes qu’on a nommées SCAN LITTORAL. Pour aller de la terre à la mer, une seule carte suffit maintenant. Ces cartes vont être disponibles dès le début de l’année prochaine.

Au delà des cartes, il existe des bases de données, souvent méconnues des acteurs du littoral, regroupant beaucoup d’informations que nous avons réunies dans une base de données historiques. Cette production altimétrique terre/mer donne une représentation tridimensionnelle de la forme et de la position du sol sur la frange littorale du territoire français en métropole et dans les départements d’Outre Mer.
Ces données sont clairsemées en mer et relativement imprécises en mer et il nous faut acquérir de nouvelles données grâce à de nouvelles technologies essentiellement par laser aéroporté. C’est-à-dire qu’un laser à bord d’un avion ou d’un hélicoptère, émet un rayon qui permet de calculer la distance entre l’avion et, selon les fréquences, la terre ou la surface de la mer, et même sous la surface de l’eau.
Ces levés, rapides et moins coûteux que les levés classiques, permettent d’acquérir des données précises. Mais, en mer, nous avons toujours besoin de levés plus classiques par sondeurs multifaisceaux (SMF) embarqués sur des bateaux. Ils sont utiles surtout pour les grandes profondeurs ou quand les eaux sont turbides. Pour des raisons de sécurité, ils ne peuvent pas aller dans les eaux peu profondes. C’est une des raisons pour lesquelles il nous manque beaucoup de données sur le littoral. D’autre part, la mission du SHOM jusqu’à présent était la sécurité de la navigation, donc nous décrivons essentiellement les chenaux de navigation. Il n’y a rien sur la plage qui est une zone où on n’est pas aller, à la limite certaines zones de Mars sont mieux connues.

Une première démonstration d’acquisition a eu lieu en juin 2005 dans le Golfe du Morbihan car c’est une zone qui concentre beaucoup de difficultés, au niveau relief, turbidité, marées et courants. Les données étaient vraiment anciennes et nous avions besoin de refaire une cartographie de cette zone. Ce levé, financé par le ministère de la Défense, nous a permis de tester le laser aéroporté. Nous nous sommes assurés de la maturité, de l’intérêt de ce capteur et de la possibilité de le coupler avec les moyens à la mer c’est-à-dire de pouvoir fusionner des données de sources différentes.
Nous avons voulu faire une seconde expérimentation à Toulon parce que cette zone est assez particulière : la marée y est très faible, il y a des falaises, des zones peu profondes, des variations des conditions de turbidité de l’eau, la présence d’herbiers. Nous avons utilisé deux laser aéroportés : un bathymétrique et un topographique. Le laser bathymétrique a été mis en œuvre en septembre 2007 à Toulon et sur la presqu’île de Giens. C’est un levé qui a été financé par l’Etat, le Conseil général du Var et une collectivité locale, Toulon Provence Méditerranée. Les données ont été acquises en deux jours, ce qui est rapide. Nous avons ensuite réalisé un levé par sondeur multifaisceau sur bateau, à l’Est et à l’Ouest de la presqu’île de Gien pour compléter avec des profondeurs un peu plus importantes. En Méditerranée, nous avons atteint pour la première fois 37 mètres de profondeur. Dans le Golfe du Morbihan, où les eaux sont assez turbides, nous avons atteint 13 mètres. Travailler en Méditerranée est plus intéressant du point de vue du laser bathymétrique.
Ensuite un levé par laser topographique cette fois a été réalisé par l’IGN, grâce à leurs avions en juin 2008. Il nous reste aujourd’hui à fusionner ces deux levés pour avoir un modèle continu. Ce sera fait à la fin de l’année.
Par ailleurs, un comité des utilisateurs, présidé par l’Ifremer, a été mis en place en avril 2008 afin de donner un avis sur les spécifications techniques du produit. Les résultats de ces expérimentations sont très concluants. La phase de production va maintenant pouvoir débuter. Les premiers levés opérationnels en métropole seront effectués en Basse-Normandie et en Languedoc-Roussillon. Plusieurs levés sont prévus également en Outre-mer : à la Réunion, à la Martinique, aux Îles Eparses et à Mayotte.

Sylvie Andreu : J’ai quelques questions complémentaires : cela m’apparaît un peu comme une conquête scientifique, une aventure possible pour ce siècle. Puisque des gens jeunes nous écoutent, quelle formation faut-il avoir pour y participer?

Catherine Le Roux : Oui c’est une aventure scientifique. Il y a des difficultés scientifiques pour fusionner toutes ces données, adopter le même référentiel… L’objectif est d’avoir une base, un socle utile vraiment à tous. Pour ma part après un baccalauréat C et les classes préparatoires scientifiques, j’ai intégré l’ENSIETA (Ecole nationale supérieure d’ingénieur des études et techniques d’armement). Je suis militaire. Pour Litto3D® j’embauche actuellement des techniciens pour valider les données : des hydrographes, des cartographes qui sachent utiliser différents logiciels et outils et manipuler ce genre de données ; et parlant anglais parce que les sociétés de sous-traitance qui pratiquent les levés laser sont toutes de nationalité étrangère : australienne, américaine et anglaise.





Mis à jour le 30 mars 2009 à 16:02