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2003 : Les mers , un océan de richesses ? > TR 4 : Maîtrise de l’environnement >  L'apport des techniques spatiales à la connaissance des océans

L'apport des techniques spatiales à la connaissance des océans

Daniel Vidal-Madjar, Délégué pur l'étude et l'observation de la Terre au CNES Centre National d'Etudes Spatiales

Biographie :

VIDAL-MADJAR Daniel

Compte rendu :

Voir la vidéo de Daniel Vidal-Madjar


Transcription :

8 novembre 2003 TR4


Discours de Daniel Vidal-Madjar



Je vais vous parler de l’utilisation des outils d’observation à partir de l’espace pour la gestion de l’environnement.

La gestion de l’environnement
La question aujourd'hui est de gérer l’environnement, c'est-à-dire de faire en sorte que nous puissions retirer par exemple de la mer le maximum de services. L’environnement ne doit pas être considéré comme étant quelque chose en soi ou à protéger en soi, c’est un objet, un milieu dans lequel l’homme et les sociétés puisent des services pour pouvoir continuer à vivre et à progresser. Donc comment faire en sorte de gérer l’environnement pour en retirer le maximum de services et d’essayer de faire en sorte que l’utilisation que l’on en fait aujourd'hui n’impacte pas les services que nous pourrions en retirer demain ? C’est le classique développement durable, c’est-à-dire de faire en sorte que les générations futures puissent tirer également de l’environnement les services dont ils auront besoin à ce moment-là.

Comment faire de la gestion ?
Pour pouvoir faire de la gestion, il faut d’abord être informé de l’état de l’environnement ; pour pouvoir être informé, il faut avoir à notre disposition un certain nombre d’observations des milieux pertinentes et adéquates. S’agissant de l’environnement marin, il faut faire des mesures in situ en mer pour avoir de l’information sur l’ensemble de l’océan, en surface comme en profondeur, on peut également faire ces observations à partir de l’espace, ce qui permet de recueillir des informations cohérentes et globales sur l’état de la surface de la mer.

Observations spatiales
Avec ces techniques d’observation spatiale, nous faisons beaucoup de choses. L’observation à partir de l’espace permet d’abord d’atteindre à l’échelle globale un certain nombre de grandeurs caractéristiques du comportement physique du milieu océanique : la température de l’eau en surface, la hauteur des vagues et leur longueur d’onde, également important pour le bilan énergétique du système océan-atmosphère, le vent de surface, la hauteur de la mer. Toutes ces grandeurs sont très liées aux interactions de la météorologie ou du climat atmosphérique avec l’océan. Elles peuvent donc être utilisées pour prévoir la dynamique de l’océan, importante pour des services de type maritime, mais c’est aussi important pour d’autres choses comme des questions qui sont liées à la biologie marine que l’on peut aussi observer à partir de la surface. Pour cela, on utilise les techniques d’observation de la couleur de la mer, c’est-à-dire que l’on observe la couleur de l’océan comme vous le faites, de façon un peu plus sélective et dans des longueurs d’onde électromagnétiques qui permettent de comprendre ce qui se passe effectivement. Cette mesure de couleur de la surface donne accès, en utilisant des modélisations biophysiques, à la production primaire océanique, c'est-à-dire le début de ce qui fera les gros poissons. Si on connaît à la fois la dynamique et la production primaire, grâce à ces deux informations et suivant un long processus, on peut espérer arriver à une gestion raisonnée de l’environnement marin, c'est-à-dire une gestion dans laquelle on ne fait pas de l’exploitation des ressources marines comme on fait de l’exploitation minière, mais une exploitation qui permette de maintenir les services que nous rende l’océan à leur niveau actuel, voire même les améliorer.
Dans ce système, on utilise les données d’observations satellitales en synergie avec des mesures in situ (bouées, flotteurs, paramètres au fond). Ces deux ensembles de mesures mis simultanément à l’intérieur de modèles qui décrivent à la fois la dynamique de l’océan et sa chimie et biochimie, nous permettent d’obtenir des informations utiles sur l’état effectif de l’océan global, tant en surface qu’en profondeur. Tout ce système est un système assez compliqué à mettre au point mais qu’on est train aujourd'hui de développer. Tout ceci ne peut pas être fait par une seule équipe ou même un seul pays. On a besoin pour développer ce genre de système de faire comme la météorologie depuis plus de 100 ans, d’organiser la coopération internationale au niveau planétaire car tout le monde a intérêt le faire, quels que soient les ressentiments des uns et des autres. Nous avons besoin de cette coopération internationale parce que d’abord les mesures in situ qui sont en réseau sont exploitées et mises en œuvre par des pays individuels ou des agences individuelles et il faut s’assurer que ces mesures in situ soient cohérentes entre elles, donc ça oblige à passer par une certaine coordination internationale. D’autre part, compte tenu des investissements hors de portée d’un seul pays, en particulier s’agissant des missions spatiales, on ne peut pas se permettre de gérer tout seul la totalité des mesures nécessaires pour arriver à une description cohérente de l’océan mondial, d’où la coopération internationale.
Aujourd'hui, l’Europe avec les agences spatiales ont pris une initiative qui s’appelle GMES (Global monitoring Environnement and Security). Ce GMES, créé en 1998, est en train petit à petit de prendre forme et sera probablement quelque chose de visible au niveau de la vie de tous les jours à l’horizon 2010-2015. Le GMES a pour objectif, comme on le fait déjà pour la météorologie, de mettre en place pour l’Europe les moyens nécessaires pour fournir aux décideurs l’information environnementale dont ils ont besoin pour gérer la planète dans le cadre des politiques du développement durable qui devient maintenant tant au plan européen que mondial un des leitmotivs de la gouvernance mondiale. La gestion de l’environnement marin sera une des priorités pour cette initiative européenne.
On ne se limitera pas à la coordination européenne car comme il s’agit d’un problème mondial, il nous faudra aller au-delà de l’Europe. C’est au plus haut niveau de l’État et au plus haut niveau des politiques internationales que les gens s’en préoccupent puisque par exemple, le G8 d’Evian, au mois de juin de cette année, a recommandé la mise en place rapide d’une coordination de moyens d’observations mise en œuvre par chaque État
Le G8 d’Evian a été suivi, fin juillet, d’un « Sommet pour l’Observation de la Terre », convoqué par les États-Unis, probablement avec un certain nombre d’arrière-pensées, dans lequel on peut discerner des questions qui ne relèvent pas uniquement de la politique de gestion de l’environnement. Le sommet de Washington a adopté, au niveau des ministres, une résolution demandant aux États de mettre en place des systèmes d’observation coordonnés à l’horizon de 10 ans. Tout ceci va bien dans le sens de l’initiative européenne, prise en 1998, dans le sens du GMES, c'est-à-dire d’une coordination internationale devant nous permettre d’accéder à l’information environnementale nécessaire pour gérer notre Planète, en particulier l’océan.

Comment pourrait fonctionner cette coordination internationale ?
L’océan global se décline en sous-mers, en sous-bassins puisque toutes les questions ne sont pas tout à fait les mêmes suivant l’endroit où l’on habite, et que ce qui est important pour les gens, c’est de comprendre en quoi la gestion de l’environnement global a des impacts sur leur environnement local. L’ensemble de ces sous-systèmes travaillera en réseaux, avec des centres nationaux qui permettront de mettre en commun l’information et ainsi de fournir des informations utiles à des applications océaniques comme la pêche, la circulation maritime, la pollution aux hydrocarbures, entre autres.

L’espace et la technologie
Jason I vole et a été lancé fin 2001. C’est un satellite franco-américain. Là aussi, la coopération est très forte ; ni la France ni les États-Unis ne se sont sentis la capacité de financer à eux tous seuls un système de ce type-là. C’est un satellite dit d’altimétrie, c'est-à-dire qui mesure les différences de hauteur de l’océan grâce auquel nous avons des informations directes, par exemple sur les courants et donc sur la dynamique globale de l’océan.
Jason II volera probablement en 2007 ou 2008, tout dépendra de la capacité de financement des États-Unis et de l’Europe. On y a ajouté, pour pouvoir tenir compte des progrès technologiques, une autre technique de mesure, le WSOA et qui représente la prochaine génération de l’altimétrie, en particulier cela permettra d’avoir une description de l’océan à des échelles beaucoup plus fines que le système altimétrique actuel.
(Images). Exemple de différences d’altitude mesurées par Topex/Poséidon par rapport au géoïde moyen calculé par des méthodes de moyenne un peu sophistiquées ; températures de surface mesurées à partir des satellites ; El Nino, c’est le seul phénomène climatique que l’on comprend aujourd'hui qui soit à l’échelle globale et qui permettre de faire des prévisions climatiques dites à moyenne échéance, c'est-à-dire sur plusieurs mois à l’avance. Par exemple, le phénomène El Nino est responsable par des téléconnexions que l’on comprend, que l’on sait modéliser, de changements du cycle de l’eau sur un certain nombre de pays. Malheureusement, ce n’est pas lui qui est responsable des changements de cycle de l’eau et de climat que l’on observe en Europe. Ce sont des phénomènes probablement plus compliqués et que nous ne comprenons toujours pas.
À partir de l’espace, on peut également mesurer la vitesse du vent à la surface des océans qui donne l’interaction directe entre l’océan et l’atmosphère et cette interaction est responsable en grande partie de la circulation océanique mais aussi de la circulation atmosphérique.
Le satellite Envisat de l’Agence Spatiale Européenne embarque un certain nombre d’instruments dont des instruments d’observation de l’océan et en particulier un spectromètre imageur, c'est-à-dire un appareil qui permet de faire des images de la surface océanique dans plusieurs couleurs (plusieurs longueurs d’onde). Grâce à ce capteur, MERIS, on peut avoir une idée de la concentration de l’océan en matière organique et en phytoplancton. Exemple au large de la Mauritanie pris à un endroit où il y a une remontée d’eau froide qui vient du fond de l’océan. Cette remontée d’eau froide ramène à la surface de l’océan des sels minéraux qui font que les phytoplanctons et autres ont tendance à se développer dans ces coins-là. Pour la gestion des pêches, c’est extrêmement utile parce que c’est là où il y a les poissons. Ce sont des images utiles pour l’aide à la pêche.






Mis à jour le 30 janvier 2008 à 11:29