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Discours d'Ahmed Djebbar : Place des technologies de l’information dans l’échange Nord-Sud

Enseignant-chercheur à l'université Paris XI Orsay, ancien ministre de l'Education Nationale, de l'enseignement supérieur et de la Recherche en Algérie

Biographie :

DJEBBAR Ahmed

Compte rendu :

Transcription :

20 octobre 2001 TR5

Discours d'Ahmed Djebbar



En tant que chercheur en histoire des sciences, spécialisé dans l'histoire des mathématiques médiévales, je crois que l'histoire des sciences est une dimension importante, non seulement pour la formation des citoyens mais aussi pour l’acquisition des connaissances même lorsqu'elles sont techniques et pour les outils qu'elle donne pour juger plus objectivement des phénomènes contemporains. Par ailleurs, grâce à la particularité de mon propre cheminement et de mon expérience de citoyen vivant dans deux espaces, dans deux mondes culturels, j'ai le privilège d'être en contact avec deux communautés méditerranéennes, celle de l'Europe et celle du Maghreb, qui sont différentes sous certains aspects et où les mêmes phénomènes ne sont pas perçus et vécus de la même manière. Ce qui m'amène à poser certaines questions ayant un lien direct ou indirect avec le sujet de notre débat.
On parle ainsi de savoir, mais de quel savoir s¹agit-il ? Est-ce que l’on parle de savoir en général ou de savoir scientifique? Et si on est d'accord sur la nature de ce savoir, y a-t-il urgence à favoriser sa circulation et sa transmission ? La technologie liée à l'information, ne risque-t-elle pas de nous imposer un type de savoir ? Comment résister à cela ? Une fois d’accord sur le savoir, est-on d’accord sur les conditions de l¹échange. Comment réaliser cet échange et avec qui ? Pour prendre l'exemple des deux espaces méditerranéen du Sud et du Nord, il me semble démagogique de parler, dans l'état actuel des choses, d¹échange de savoir entre ces deux espaces. Dans la réalité du quotidien, on ne fait qu'aider au développement d'une circulation dans un seul sens.
Autres questions : les technologies de l¹information ne vont-elles pas accentuer, sinon aggraver la situation de ces pseudos échanges entre les deux rives de la Méditerranée ? Ne va-t-il pas y avoir un tri des richesses culturelles méditerranéennes, et selon quels critères ? Le rôle de la technologie de l¹information ne va-t-il pas consister, uniquement, à camoufler, dans un premier temps, les problèmes anciens avant de les aggraver ?
Les technologies de l'information, qui se sont installées depuis quelques temps dans le cadre de rapports de forces déjà définis historiquement, peuvent-elles jouer un rôle dans le changement de ces rapports, entre le Nord et le Sud ? Faut-il d¹abord régler ces rapports Nord/Sud pour que les technologies de l'information, jouent pleinement leur rôle, c'est à dire celui d'être un élément parmi d'autres, plus rapide et plus efficace, dans la concrétisation, le développement et la consolidation de véritables relations d'échange ?

Pesanteur du cadre social sur les usages technologiques

Les techniques de l’information s’imposent actuellement à nous ; on a l’impression qu’ici, au Nord, on peut intervenir dans le rôle qu’elles peuvent jouer, mais a-t-on réellement, dans le Sud, les moyens d’intervenir et de réorienter éventuellement le rôle de ces techniques dans notre espace ? Va-t-on encore vivre une aggravation de la soumission et subir des décisions prises ailleurs, camouflées par le fait que “ la technique voudrait ” ceci, cela ? Si nous n’avons pas tout à l’heure le contact que l’on devrait avoir avec Sarajevo, sera-ce dû uniquement au fait qu’une personne n’est plus dans l’université de Sarajevo ou est-ce que la technologie, maîtrisée ici ne le sont pas là-bas, non pas en raison de savoirs scientifiques, mais du fait des inégalités de la situation de nos deux espaces ? Certains acteurs du Sud (en particulier en Algérie) n’ont pas les mêmes privilèges que nous, qui n’ont pas le même type de rapport avec cette technologie de l’information que nous. Il y a aussi des têtes bien faites qui pratiquent la science, la culture mais malgré la volonté des hommes, on se heurte à des blocages liés aux structures sociales. Je l’ai vécu avec mes étudiants, ou quand j’étais responsable d’un ministère. Il ne faudrait pas que l’on discute uniquement de la technologie. Il faut aussi discuter des hommes et de leurs rapports dans leur espace et entre deux espaces.





Mis à jour le 04 février 2008 à 16:04