logo entretiens Energies de la mer bandeau entretiens Science et Ethique
M E N U

Année :



Veilles internationales
Informations du 29/03/2024

Energies de la mer
www.energiesdelamer.eu

energiesdelamer.eu vous souhaite un bon week-end de 15 août


B R È V E S


Le littoral vu par les jeunes
Les webtrotteurs des lycées Vauban et Kerichen sont allés à la rencontre des jeunes des écoles de Ouessant et du Conquet et leur ont posé une question simple : Pour toi, qu'est-ce que le littoral ?

Visionnez les réponses des jeunes :
- Ecole Sainte Anne à Ouessant
- Ecole Saint Joseph au Conquet



2005 : Le littoral et les avancées scientifiques > TR 3 : Penser ensemble le littoral de demain >  L’omniprésence du littoral dans l’actualité

L’omniprésence du littoral dans l’actualité

Louis Le Pensec, Sénateur du Finistère, vice-président du Conseil Général du Finistère

Biographie :

LE PENSEC Louis

Compte rendu :

Voir la vidéo de Louis Le Pensec


Transcription :

8 octobre 2005 TR3


Discours de Louis Le Pensec

Je sais qu’on me prête beaucoup. J’aurai l’occasion de dire en quoi je ne suis pas l’auteur de la loi « littoral ». Je l’ai inspirée.
Chers amis, quelle est ma légitimité à venir m’exprimer ici, un peu brièvement, sur un sujet passionnant ? On dit les élus éloignés du terrain des réalités. Je suis Conseiller Général de base à Clohars-Carnoët, me « coltinant » avec les questions de l’urbanisme à Le Pouldu, Doëlan - autant de dossiers qui font parfois la une de l’actualité. Je suis vice-président du Conseil Général du Finistère, en charge de l’International. Je suis législateur, donc j’y reviendrai, puisque je contribue à faire la loi. Et puis je suis dans des Instances Consultatives, membre du Conseil National du Développement Durable dont je dirais aussi quelques mots, tout de même. Et comme il faut tenir les deux bouts de la chaîne entre le local et le mondial, je suis membre du bureau mondial de l’organisation unique des collectivités locales au monde, sous l’égide de l’ONU, cités et gouvernements locaux unis. J’ajoute qu’à l’échelon européen, j’y assume des responsabilités comme vice-président des communes et des régions d’Europe. Vous ne direz pas que vous ne saviez pas, désormais.
La semaine a été très riche en colloques divers et variés. Même dans la région Centre où j’avais, il y a deux jours, un colloque sur la contribution des régions à l’action de l’Europe dans le monde, on a parlé du littoral. Jacques Attali est venu nous dresser un tableau – je n’ai pas dit apocalyptique – mais tout de même un peu de ce que sera la réalité démographique humaine et la pression sur le littoral. C’est dire que ça ne laisse personne indifférent. Donc je suis venu pour adresser un certain nombre de coups de chapeaux. On va commencer par les coups de chapeaux. Mais y aura des coups de cœur.
Les coups de chapeaux sont pour les organisateurs. Vous direz : « C’est facile, on brosse dans le sens du poil ». Véritablement, il faut pouvoir continuer, au fil des années, à tenir de telles journées, auxquelles je n’ai pas participé antérieurement. Mais avec le recul je mesure ce qu’est son apport, même si vous n’en êtes pas tous et toutes convaincus. Il en restera quelque chose. Donc, je dirai, continuez à creuser votre sillon fécond.

Le coup de chapeau aux associations. Moi, j’ai été initié à la sensibilité écologique par « Eau et Rivières de Bretagne », en 1976. Ca a été ma prise de conscience. Puis par « Bretagne Vivante », dite SEPNB à l’époque. Le coup de chapeau, pourquoi ? Et bien, parce que, étant sur le terrain, voyant les conflits d’usage avec leur développement jurisprudentiel, je peux dire qu’il y a des associations qui ont du courage ; car ce n’est pas aisé d’aller à contre-courant, je dirai, de l’idéologie dominante ou du système dominant productif en agriculture, et d’affronter localement, j’allais dire face-à-face, les tenants d’autres thèses. Il est aisé parfois de discourir en chambre, mais là où il y a des développements de jurisprudence avec leurs conséquences : chantiers, arrêtés et autres, et bien ceci peut demander un certain courage, que je reconnais. Entendons-nous, j’ai cité deux associations, je serais injuste, mais j’ai voulu mentionner celles qui ont contribué à mon engagement.
Le coup de chapeau aux scientifiques. J’entends par scientifiques pas seulement les biologistes, ce qui était avant une conception un peu primaire de la chose. Bien sûr des biologistes, mais tant d’autres ! Et je range aussi dans cette rubrique et sous ce chapeau les géographes, les historiens, dont vous avez pu entendre quelques éminents représentants. Coup de chapeau ! Et une pensée pour Roland Paskoff, géomorphologue, membre du conseil scientifique du Conservatoire du littoral, qui nous a quitté. Sa contribution fut éminente pour la connaissance de la réalité littorale.

Pourquoi un coup de chapeau aux scientifiques ? Je dirai, dans un premier temps, parce qu’ils ont élargi mon vocabulaire. Je commençais à me fatiguer de décliner sur tous les tons dans mes discours ministériels : « Le littoral, espace rare, fragile et convoité ». J’en étais arrivé à ne plus oser le dire, tant cela était une formule passe-partout, ce qui est facile parce qu’en fait ça représentait une réalité. Et voilà que vos entretiens contribuent à enrichir mon vocabulaire par, j’ajoute désormais, « complexe ». Et, j’ajoute, non reproductible. Donc tout cela traduit au fil des décennies l’enrichissement de notre connaissance de la réalité littorale, et j’en donne acte aux scientifiques qui m’ont fait découvrir la vraie nature du littoral. Il est à présent établi que le littoral ne sépare pas la mer de la terre. On a souvent vécu sur cette idée. Et puis voilà que prévaut l’idée que c’est une zone d’interpénétration des milieux, source d’une richesse et d’une systémique assez prodigieuse. Nous pouvons dire à présent que le littoral est un espace vital. Ceci est à prendre dans toutes les dimensions du mot. J’ajoute que, depuis le tsunami, nous portons un tout autre regard sur le littoral. Je serai tenté de dire, tout le monde. J’espère que là où l’on reconstruit on porte aussi cet autre regard – où on essaie, dramatiquement ; j’espère que cette nouvelle vision aidera ce qui est la reconstruction. Et puis le littoral est devenu une destination privilégiée pour une France, mais aussi pour une Europe en mal d’espace. C’est une question qui me préoccupe beaucoup et sur laquelle, disons-le, les scientifiques géographes, prospectionnistes divers, devraient encore plus nous éclairer. C’est véritablement une commande que, je vais dire, que je passe, sur les tendances fortes, lourdes, qui peuvent attendre le littoral. C’est tout de même étonnant en regardant, hier au soir, la télévision, de voir le nombre de séquences, de sujets, qui ne traitaient que du littoral. Bien sûr, Alain Merckelbagh a dû exposer devant les auditeurs bretons « l’urbanisme littoral », mais les autres sujets nationaux, c’était la SNCM – non, c’est vrai que le littoral est concerné. C’était, le réchauffement de la planète – incidence sur le littoral. Et, j’ai encore vu un autre sujet, que je n’ai plus en mémoire, mais je me dis, ce n’est tout de même pas les seules journées de Brest… Ah non ! C’est étonnant, étonnant la part du littoral dans l’actualité comme véritable espace de vie. Les scientifiques nous ont fait découvrir le rôle de la biodiversité et, comme j’ai été cinq ans ministre de l’Outre-Mer, j’ai pu de ce point de vue appréhender la richesse de cette biodiversité, la complexité de l’application de la loi « littoral-Outre Mer », avec la notion des 50 pas géométriques. Vaste sujet qui nous retiendrait toute la journée. Et, donc, l’apport des scientifiques fut peut-être aussi utile, nous avons besoin de modélisation pour anticiper ce que seront les évolutions, mais surtout je pense qu’ils nous ont, depuis plus de vingt ans, montré toutes les limites de ce que l’on appelle l’approche sectorielle de la question, des questions du littoral. Ceci me conduit à considérer que les autorités étatiques du gouvernement seraient bien inspirées, à l’heure où ils préparent un certain nombre de décrets, de penser qu’à côté du Conseil National du Littoral, envisagé par une récente loi, on adjoigne un conseil scientifique qui serait bien utile. Cela n’est pas pour pallier les insuffisances du Conseil National du Littoral bien que, je regrette - et c’est pour cela que je n’ai pas voté notamment - la part très congrue qui est faite, aux associations de défense pas seulement, mais aux associations qui ont comme centre d’intérêt le littoral. Donc, voilà ce coup de chapeau aux scientifiques, dont on attend encore beaucoup dans ce qu’ils nous on fait découvrir, ajouterai-je, depuis plus de vingt ans la part déterminante des nitrates dans le phénomène des algues vertes, à l’heure où certains s’obstinent à considérer que : « Oui, mais on n’est pas les seuls ! » D’accord, il y a aussi les rejets urbains, mais tout de même. Les scientifiques nous ont bien montré qui étaient, pour une très grande part, à l’origine de la prolifération de nos algues vertes.

Chers amis, dans la rubrique « coup de chapeau », je dirai que je saluerai l’action qui a été engagée par le Conseil Général du Finistère. Je le fais d’autant plus, je la mentionne depuis 1969, à une majorité à laquelle je n’appartenais pas mais dont je reconnais qu’elle avait engagé une politique de protection des espaces naturels. Je le dis car ce département qui vous accueille, qui accueille un certain nombre, a engagé une politique qui, à côté de l’action du Conservatoire du Littoral – 3 340 hectares acquis – a permis au Département d’acquérir 1 800 ha. Ce sont ce qu’on appelle des politiques coordonnées conjointes.

Stratégiquement en Finistère, le Conservatoire du Littoral envisage et peut raisonnablement penser à l’acquisition de 10 500 ha. Le département continuera à acquérir, avec la taxe départementale, des espaces verts. Deuxièmement, ceci se double d’une politique de protection du littoral ; je ne fais que la mentionner, mais ceci se double d’un engagement résolu dans une stratégie de développement durable. Je prends à témoin notre ami Michel Glémarec. Engagement résolu qui va nous conduire l’an prochain à publier notre Agenda 21 dont nous conduisons à marche un peu forcée les travaux d’élaboration. Si l’on considère que l’ensemble des politiques du Conseil Général – je dis bien l’ensemble – est passé au crible à l’aune des impératifs du développement durable. Il n’est pas une politique, il n’est pas un programme – je parle de programme dans le sens de programme financier, programme communautaire – aucun programme qui ne soit passé au crible, voire remis en cause, à coup sûr amendé, modifié pour les temps qui viennent. C’est une tâche immense et dans les objectifs de cette stratégie de développement durable il en est une qui s’appelle la maîtrise de l’artificialisation de notre territoire. C’est une question énorme, au cœur de vos préoccupations et qui attend des réponses, je pourrai dire, un peu urgentes. Le Finistère a, en Bretagne, un taux d’artificialisation supérieur à d’autres départements - environ 13 % pour autant que je m’en souvienne. Il a un mode d’habitats dispersés, très consommateur d’espace. Nous sommes dans l’attente des véritables outils d’une maîtrise collective du foncier dans ces espaces sensibles. Je salue l’avènement, au niveau de la Région, de la mise en place d’un établissement publique foncier, de la mise en place d’une charte pour les espaces littoraux, et tout ceci était attendu. Je suis heureux que la volonté soit au rendez-vous. Il est de fait que la Région n’a pas compétence de droit sur les questions du littoral. Elle a considéré qu’elle avait une responsabilité et qu’elle avait une légitimité pour s’y engager et je dirai que j’applaudis. Ceci va conduire, du fait de la répartition des compétences, à l’élaboration d’un document de référence non contraignant, mais qui tiendra sa force du fait qu’il sera le fruit de l’accord le plus large. Et donc tout ceci s’inscrit pleinement dans ce que nous étions nombreux à souhaiter, une gestion intégrée des zones côtières. Il y a là une démarche qui est, à mes yeux, très porteuse pour le futur.

Après les coups de chapeau, les coups de cœur.

Le Conservatoire de l’Espace Littoral. On a coutume de dire que la protection du littoral en France va constituer un pôle d’excellence. C’est vrai que nous avons pour cela un outil éminent, le Conservatoire. François Letourneux le dira sans doute tout à l’heure encore mieux que moi. Lorsque nous nous rendions en Grande-Bretagne pour étudier les actions du National Trust, nous allons bientôt, après 30 ans d’existence du Conservatoire, il égale en le National Trust qui existe depuis 110 ans. C’est pour resituer les choses, mais surtout pour souligner la méthode du Conservatoire, faite de dialogue, faite de partenariat, faite de recherche de consensus, et dans des entretiens qui se veulent marqués par la recherche de l’Ethique, je crois qu’il y a là une voie aussi, non seulement prometteuse – elle a donné ses résultats - mais surtout une culture du dialogue qui fait que le Conservatoire est devenu un référent pour la Communauté Internationale.


Chers amis, j’avais coutume de dire, parce qu’il faut bien de temps en temps avoir des phrases qui restent en mémoire, que c’est une agence foncière qui gère un capital de liberté, de rêve et de poésie. Vous avez pu noter au cours de l’été que le président de la République a tenu à venir saluer les 30 ans du Conservatoire. Du discours je retiendrai presque surtout - car je crois que c’était là l’innovation – la nécessité de voir le Conservatoire doté de ressources pérennes, et donc affectation d’une taxe fiscale, celle sur les bateaux : la taxe de francisation. J’ai salué cela comme une avancée. Le reste était plus des formules. J’attends de voir actuellement, concrètement, ce que cela va signifier en dotation, en moyens. Il n’en demeure pas moins, que ceci ne suffit pas à répondre à la question des moyens lorsque le Conservatoire est confronté à ce que ses dirigeants appellent « des coups durs ». Et les coups durs, c’est quoi ? Et bien, lorsque le Conservatoire doit faire face à une opportunité d’acquisition qui peut porter d’emblée sur 15 000 ha, car il y a parfois des salins qui se trouvent mis sur le marché et si on veut les soustraire à la marchandisation, il faut avoir les moyens de les acquérir. Donc c’est une question budgétaire. Le Premier Ministre, Lionel Jospin, m’avait demandé, en me mettant parlementaire en mission, de réfléchir pendant six mois à la refondation du littoral, de prévoir des dispositions simples et concrètes. Ce qui fut fait, avec le concours de Bettina Laville quand il le fallait, parce que ce n’est jamais aisé de légiférer sur le littoral en France. Je ne sais pas si vous vous en êtes aperçus, mais depuis la loi sur le littoral il n’y a jamais eu la question du littoral abordée au Parlement sous le titre : « Nouvelle Loi Littoral ». C’est toujours accroché à d’autres sujets. J’ai du utiliser le même artifice, c’est à dire toutes les propositions que je faisais pour refonder le Conservatoire, je les ai présentées au Parlement. Elles ont été votées à l’unanimité ! Le Premier Ministre m’avait dit : « Oui, mais juste trois lignes ! » Alors là, il me semble qu’on a ouvert la boîte de Pandore. Le Parlement a voté des pages entières, presque contre l’avis du gouvernement. Je voulais simplement dire que, oui, c’était un texte attendu dans la mesure où il refondait, dans la mesure où il permettait au Conservatoire de gérer le domaine, une part du domaine publique maritime, dans la mesure où il donnait une volonté de faire que la France se tourne un peu tout de même vers la mer. Ce qui change beaucoup dans les attributions du Conservatoire. Et puis, ça clarifiait aussi tout ce qui a un paysage juridique qui s’était un peu obscurci, en distinguant bien la responsabilité de ce qui est l’acquisition et de ce qui est la gestion, en partenariat avec les collectivités locales – Yvon Bonnot en sait quelque chose. Je représente le Finistère au Conseil de Rivage où les collectivités ont à se prononcer en amont des acquisitions de terrains. Mais vous avez bien compris que le Conservatoire ne saurait en soi constituer une politique du littoral, même si c’est un très éminent outil.

Et il y a la loi « littoral ».

La loi « littoral » est une bonne loi. Je le dis d’autant plus que je n’en suis pas l’auteur. Je suis toujours étonné de voir, j’allais dire, ce que retiennent les français de l’identification des auteurs des lois. Et donc : « Ah oui ! La loi « littoral » dont vous êtes l’auteur ! » Je suis obligé de me défendre. Non pas que j’ai quelque chose contre la loi « littoral ». Par contre il y a d’autres lois que j’ai faites en neuf ans de gouvernement dont on a oublié que j’étais l’auteur. D’abord je ne les avais pas faites pour qu’elles portent mon nom. Il y a beaucoup de lois, en France, qui sont faites exclusivement pour que les ministres laissent une trace dans l’Histoire. Je n’avais pas ce souci. Qui se souvient que la loi « Pitt-bull », c’est votre serviteur ? Personne. Donc, la loi « littoral » est une bonne loi, parce qu’elle est sur la sellette. Sur son apport je dirai qu’elle a contenu une pression foncière. Je ne sais pas où nous en serions en l’absence de loi « littoral ». Donc elle a ses insuffisances, tout de même, la loi qui serait parfaite n’existe pas. Vous avez pu noter la lenteur de prise de décrets. Différents gouvernements ont leur part de responsabilité là-dedans mais que quinze ans, quinze ans après on en soit à attendre des décrets, ceci a produit que la jurisprudence a comblé les vides, je dirai c’est pas un mal. Là où ça devient un peu un mal, c’est lorsqu’il y a un peu de désordre dans la jurisprudence ou du moins des décisions contradictoires. Là, il y a véritablement ce que disent certains, soit insécurité juridique. La jurisprudence a dû expliciter le concept d’extension limitée de la construction, le concept d’urbanisme et de continuité d’urbanisme. Je le redis, ce n’est pas la loi « littoral » qui a créé des désordres, mais des jurisprudences contradictoires et ceci crée, de-ci, de-là, des situations de tension très réelles qui voient des élus désemparés, révoltés, des imbroglios, des chantiers arrêtés... Et, dans l’attente de clarification de la jurisprudence, ce n’est pas un chantier qui est arrêté, mais de très nombreux chantiers, je pense aux stations d’épuration. J’attends toujours que le ministre veuille bien me dire le nombre. La question a été posée il y a trois mois mais c’est long, vous savez, à obtenir des réponses… Comme si l’Etat n’avait pas, actuellement, rapidement, la réponse à la question. Donc ceci suscite des réactions contraires d’élus qui souhaitent des aménagements. Vous noterez que la loi « littoral » a sûrement, d’un point de vue, une appréciation très positive puisque personne n’ose dire qu’il veut la remettre en cause. Ceux qui souhaitent des aménagements disent : « Toujours sans toucher aux fondements de la loi ‘‘littoral’’, nous souhaitons néanmoins… » Je le redis, nous ne savons pas, en France, légiférer sereinement sur les questions du littoral. On ne sait pas. Donc, vous avez pu voir que pour le Conservatoire, j’ai dû accrocher mes propositions à la loi « démocratie de proximité ». Ca ne me déplaisait pas, après tout. Vous avez vu que tout ce qui a fait débat, cette année, à l’Assemblée et au Sénat, c’était une disposition, un amendement dans la loi « territoires ruraux », la loi sur les territoires ruraux. Les approches conflictuelles sur les questions du territoire font sans doute qu’on n’ose pas aborder frontalement la question, mais de biais, alors qu’il serait tout à fait loisible pour le gouvernement de dire : « Bon, sur le littoral, tout de même, traitons-en… ». Je ne vais pas dire : « Traitons-en une fois pour toute », car ça n’existe pas, une législation une fois pour toute, mais on n’aborde pas ces questions de manière sereine, rationnelle, et donc ça donne lieu, je dirai, à des embardées parfois politiciennes, et tout ça ne laisse pas une bonne impression. De même, le fait que des amendements soient approchés au Sénat, tout d’un coup, et débarquent sur la table, alors que ces amendements auraient demandé tout de même une véritable expertise, lorsqu’on vient dire : « Les étiers et les rues… » Avant de légiférer, non pas définitivement mais, de manière très précise, je ne suis pas sûr qu’on ait conduit les investigations, les analyses, qu’on ait associé les scientifiques. Je continue à croire qu’il doit être possible de trouver une indemnité sur des questions de littoral, pour autant qu’il ne s’agisse pas de brader ce que la nation a acquis, j’allais dire, comme cadre juridique au fil des années.
J’ajoute qu’on légifère de trop. Enfin, la moitié des questions, voire beaucoup plus, sont d’ordre réglementaire et, à la limite, n’auraient pas dû venir au Parlement. Le règlement n’est pas la loi, et donc, sur ces questions-là, si on voulait bien se donner la peine de mettre autour de la table, non seulement les représentants des associations, les scientifiques, les juristes, le Conseil d’Etat, les diverses administrations, il est possible, c’est ma conviction, de trouver un point d’équilibre.

Mes regrets, c’est que je ne pense pas que le Conseil National du Littoral soit le lieu où ceci sera élaboré. Mais ne faisons pas de procès d’intention, il n’a pas encore commencé à fonctionner. Donc, je n’ai pas voté les dernières dispositions. J’ai considéré que c’était des brèches et que c’était un signal, un encouragement, pour d’autres brèches. Il y a brèche sur la bande des 100 m dans les étiers et les rues, notamment, Et donc je dirai : « Attention » ! Loin de moi l’idée de considérer que tous les élus locaux sont appâtés par le gain. En tout cas, pour ce qui est de cette Région où on n’a pas à subir de mafia – je pèse mes mots – pour ce qui est des questions d’urbanisme. A ma connaissance, c’est un procès qu’on ne pourra pas faire à des élus, celui d’être instrumentalisés par des forces peut-être obscures, mais efficaces. Donc mon appréhension est que, à l’occasion de l’élaboration des SCOT, une véritable question se pose lorsqu’il existe des SCOT qui ont la taille d’une communauté de commune, voire d’une petite communauté de commune. Moi je me suis élevé contre, j’ai dit au préfet – même contre l’avis de mes amis – qu’il n’était pas sérieux de faire un SCOT communautaire. D’aucun considéraient que l’ensemble du Sud Finistère, ce qu’on appelle le Pays de Cornouaille, devait faire l’objet d’un seul SCOT. Je me serais accommodé qu’il y en eut trois, parce qu’il y a quand même des réalités très typées - le pays bigoudin par exemple, pour ne citer qu’un cas, qu’Alain Merckelbagh connaît. Oui, mais je comprendrais que le pays bigouden et le Cap puisse faire l’objet d’un SCOT. Mais les SCOT, au niveau d’une communauté de commune de 30 000 habitants, avec une annexe qui peut être le schéma de mise en valeur de la mer, annexe valant schéma de mise en valeur de la mer… Je conçois que, de schéma, il n’y en a pas eu beaucoup. C’était une idée que j’avais lancée…
Je conclus avec un mot sur l’Europe. Je trouve qu’une question aussi essentielle, à mes yeux, aurait dû mériter plus d’intérêt de la part de l’Europe, ce qu’on appelle une politique commune pour le littoral. Je suis conscient qu’elle n’existe pas pour un certain nombre de raisons, et notamment le fait que chacun des Etats a des situations totalement différentes. Entre le littoral belge qui est construit, et en France où nous avons peu ou prou tenté d’atteindre le tiers sauvage, il y a de grandes différences qui ne vont pas faciliter une politique commune. Mais l’affaiblissement de l’Europe, je le dis, c’est sur ces questions-là un désordre accru.

Conclusion, le littoral libre et ouvert est une conquête républicaine qu’il faut défendre. J’y ai mis les moyens quand il le fallait en prenant la direction de bulldozers. On l’a fait sur les plages de la Méditerranée – dites-vous bien que ce n’est pas très tendance, actuellement. J’attends de voir que la compétition Sarkozy et de Villepin s’exerce aussi sur ces questions-là, pour garantir un littoral libre et ouvert. Mais en parcourant le monde, j’ose dire que l’accès à ce littoral est un des éléments du pacte républicain. Vos travaux sont un très grand moment de prise de conscience des menaces. Je considère qu’il n’y a pas de pilote dans l’avion actuellement sur cette question-là au niveau national – ou en tout cas de pilote ayant un plan de vol. Je vous dis, continuez à être les vigies vigilantes de cette question, actionnez les cornes de brume à bon escient et aidez-nous à baliser les risques pour qu’on ne dise pas dans dix ans, dans quinze ans : « Nous ne savions pas ».

Merci.







Mis à jour le 22 janvier 2008 à 10:27