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2003 : Les mers , un océan de richesses ? > TR 2 : Observation et connaissance des océans >  Débat de la table ronde 2

Débat de la table ronde 2

Jean-Claude Bodéré, Président UBO
Gildas Borel, OIKOS Environnement-Ressources
Anne-Marie Alayse, Ifremer
Henri Bougault, ex Responsable département géosciences marines Ifremer
Gérard Jugie, Directeur IPEV
Etienne Cailliau, ancien Ingénieur général de l'armement
Gérard Riou, Directeur Ifremer Brest
Joseph Cohic, ancien Officier de navigation des navires de recherche de l’Ifremer
Roger Hekinian, Ifremer - Géosciences Marines
Jean-Louis Bouet-Leboeuf, ancien Chef au SHOM
Yves Lancelot, Vice-président AFAS
Jean Francheteau, Directeur Ecole Doctorale IUEM UBO
Howard Cattle, Directeur programme CLIVAR

Compte rendu :

Voir la vidéo du débat


Transcription :

7 novembre 2003 débat de la TR2


Débat



Jean-Claude Bodéré :
Le premier point à souligner est la richesse et la diversité des exposés qui vous ont été présentés. On est passé du pratique au philosophique et au synthétique. On note aussi des différences assez sensibles d’objets de recherche, ainsi que d’objectifs, d’échelles, de territoires. On passe du local au régional et du régional au national et ensuite au mondial. On va relativement loin en ce qui concerne les territoires. Je crois que l’essentiel réside dans l’emboîtement des démonstrations. Il y a là une grande chaîne qui a été développée : observations, prévisions, décisions, avec tous les partenariats. J’ai été extrêmement sensible à un certain nombre d’éléments relatifs aux outils et notamment à la télédétection et il faut dire que la démonstration un peu exotique mais éminemment intéressante concernant le pergélisol sibérien, a été quelque chose d’essentiel dans la chaîne des démonstrations faites aujourd’hui. C’est vraiment quelque chose de très démonstratif où on voit qu’un faible décalage d’épaisseur de glace entraîne des modifications climatiques moyennement sensibles mais avec d’importantes répercussions, notamment en matière d’évolution du trait de côte. Les évolutions peuvent ne pas sembler trop critiques ; elles le sont en réalité, en particulier pour les populations locales soumises à des déséquilibres majeurs de leur espace de vie. Les interrogations sont multiples ; il n’est pas facile de répondre aux inquiétudes des autochtones.

Gildas Borel :
Pour la coopération européenne dans le domaine de l’océanographie, que ce soit en terme de recherche ou en terme de moyen naval, quel a été l’impact de tous les programmes européens en terme de collaboration ? Il y a les pôles nationaux avec leurs pôles locaux. On a vu que les programmes de recherche sont internationaux, les mises de moyens océanographiques aussi. Y-a-t-il entre la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni des collaborations supérieures à celles qui existent au niveau international, est-ce que la dimension européenne s’affirme ?

Anne-Marie Alayse :
En partie, parce qu’il y a plusieurs types d’accord. Au niveau des flottes, il y a un accord qu’on appelle de temps échange bateau entre l’Allemagne, l’Angleterre et la France et une fois que les dossiers de campagne ont été évalués et classés, les gestionnaires de la flotte Ifremer essaient de programmer sur des navires étrangers ou anglais ou allemand une partie des opérations qui sont faites. Ça se fait sans financement, c’est-à-dire qu’à chaque bateau, on attribue un nombre de points et il n’y a pas d’échange d’argent, c’est du temps échange bateau. Bien sûr, après il y a des coopérations au niveau des programmes, entre autres avec les PCRD, il y a eu plusieurs programmes où différentes équipes au niveau européen ont participé. Par exemple, je connais plus particulièrement ceux sur les sources hydrothermales dans les zones des Açores où il y a eu plusieurs programmes qui ont permis à des équipes anglaises, portugaises de travailler avec les équipes de l’Ifremer et du Cnrs.

Henri Bougault :
Il y a certes des accords mais qui résultent d’accords en définitive entre instituts de recherche ou entre gestionnaires de moyen naval. La mise en place de programmes est une autre affaire. Je voudrais indiquer qu’on est face à un problème important. On a cessé de dire que l’océan s’étudie à l’échelle globale, c’est vrai pour la physique océanographique, pour les géosciences, pour la biologie et la microbiologie où on va bien entendu choisir les endroits où ce qu’on veut étudier est le mieux exprimé. L’Europe a une attitude de valoriser, d’étudier ce qui se passe dans la flaque d’eau européenne et si le programme auquel a fait référence Anne-Marie Alayse (sources hydrothermales) s’est passé dans la zone des Açores, ce n’est pas évidemment uniquement pour ça mais c’est aussi parce que c’est une zone d’eau européenne. Il y a donc un travail important à faire au niveau de Bruxelles qui est de faire sauter absolument ce verrou pour ce programme parce que des études amont avaient impliqué des équipes américaines et j’avais été obligé de faire des montages absolument incroyables pour avoir la participation de collègues américains à ce programme. Donc, mon message est qu’il existe bien des accords entre des équipes européennes, des gestionnaires mais au niveau de Bruxelles, c’est une attitude beaucoup trop européo-européenne et qui ne fonctionne que dans la flaque d’eau européenne.

Gérard Jugie :
Je remercie notre collègue Henri Bougault de soulever ce problème qui a été parfaitement illustré dans l’exposé de notre collègue britannique, Howard Cattle, où on voit, par exemple, que tout l’océan sud est plein de vides. Il est difficile parfois de faire soutenir par l’Europe des programmes qui ont lieu sur le continent Antarctique, et il faudrait aider à la sensibilisation des décideurs européens au fait que la planète est une planète globale et que les expériences ou les travaux doivent être dictés par des thématiques scientifiques et non par des conditions purement géographiques.

Etienne Cailliau :
Je crois que l’une des choses que l’on peut ressentir à l’issue de cette journée extrêmement riche en matière d’observations, c’est que d’une part nous manquons considérablement de données d’information pour comprendre le système océan mais que d’autre part, les nouvelles technologies nous permettent d’accéder de plus en plus à des données dans un volume tout à fait excessif. Je plaiderai donc pour une observation intelligente, qui ne soit pas aveugle et qui soit notamment contrainte par les besoins de la modélisation et puis par la connaissance scientifique.

Je suis un peu inquiet de ce qui a été dit ce matin par Jean Francheteau que nous assistons à une certaine appropriation de l’océan, donc nous devons aujourd’hui craindre sous l’effet politique et également sous l’effet économique quelque chose et nous devons, je pense, essayer dans toute la mesure du possible d’être libres de nos observations et que celles-ci puissent être librement échangées. On peut se satisfaire d’une certaine ouverture de la part militaire des choses, on connaît maintenant l’océan Arctique beaucoup mieux depuis que les sous-marins nucléaires américains nous ont donné leurs observations. En France, nous faisons également des efforts pour échanger les informations. Etre sous l’emprise économique avec les contraintes de confidentialité qui y sont associées, cela peut poser des problèmes et il faudrait faire en sorte que l’océanographie reste un espace ouvert, au moins pour la base de l’océanographie, quitte à ce que bien entendu lorsqu’il s’agit d’applications, les règles jouent.

Gérard Riou :
En ce qui concerne les observations, je ne partage pas tout à fait le commentaire de monsieur Cailliau, je pense que dans beaucoup de cas, on manque d’observations, il y a des endroits où on en a trop et d’autres où on en manque. Par contre, je partage complètement la conclusion qu’il en tire et qui dit qu’il faut que le système d’observation soit pertinent et soit cohérent par rapport à la modélisation. C’est vrai dans le cas où on est arrivé au stade de la modélisation et je crois qu’on pourrait peut-être le généraliser en disant qu’il faut que le système soit cohérent par rapport à l’interprétation et à l’usage scientifique que l’on fait. Cela veut dire que l’observation systématique sans savoir ce qu’on va en faire, effectivement, c’est complètement critiquable. Quand un programme débute, qu’il est dans une phase qui est pré-opérationnelle, on ne sait pas toujours quel est le maillage, quelles sont les données qui seront véritablement pertinentes, donc il y a cette phase d’ajustement et de tâtonnement qui fait qu’on va acquérir des informations qui peuvent être en surnombre mais on voit bien que, dès qu’on attaque un programme global, arriver à avoir une couverture correcte relève quand même parfois de la gageure. Mais ça doit être effectivement optimisé par rapport à la connaissance et par rapport aux objectifs qu’on se fixe. Et j’insistais bien d’ailleurs en disant qu’il faut qu’il y ait une deuxième flèche qui apparaisse sur le schéma entre la modélisation et le système d’observation in situ. Quant à l’échange de données, il y a des discussions internationales, des accords internationaux, il y a un rapprochement qui s’est fait avec la création de la JCOMM entre les organisations météorologiques et la commission océanographique intergouvernementale avec de nouveaux textes et de nouveaux accords qui sortent. C’est vrai qu’ils n’ont pas tout libéralisé et, aujourd’hui, on en reste encore finalement à la résolution 40 qui règle l’échange de données dans le domaine de la météorologie, c’est-à-dire que c’est libre, sauf pour ce qui est véritablement stratégique. On a quand même un petit avantage, c’est que la liste de ce qui est réellement restreint n’est pas forcément établie clairement, elle est assez squelettique et donc ça a permis de concevoir des programmes comme ceux de l’océanographie physique qui permettent d’échanger librement l’ensemble des informations. Je crois que cette ouverture sur cet échange ne fera que progresser dans le temps, du moins je le souhaite également.

Joseph Cohic :
J’ai remarqué qu’Ifremer et la France n’étaient plus très présents dans le Pacifique. Est-ce un retrait volontaire, pour des questions budgétaires ? Je voulais également savoir si le tube de carottage qui permet d’aller jusqu’à 50 mètres de longueur est en un ou plusieurs tronçons ?

Gérard Jugie :
C’est plus que 50 mètres, on espère aller au-delà de 70-75 mètres. Ce sont des tubes vissés les uns dans les autres, avec à l’intérieur un tube de PVC.

Anne-Marie Alayse :
Nous irons dans le Pacifique l’année prochaine avec l’« Atalante ». Ce sont les équipes scientifiques qui choisissent les lieux où on va faire les campagnes. On va envoyer un appel d’offres auquel les scientifiques répondront et celui-ci tiendra compte de l’avis qui a été donné par les différents programmes nationaux, par les organismes de recherche, des zones dans lesquelles ils veulent travailler, dans les deux années à venir. Nous avons aussi de moins en moins de bateaux, donc c’est une raison pour être moins dans le Pacifique.

Roger Hekinian :
Quelle est la surface de la cartographie faite jusqu’à présent dans les fonds marins ? Qu’est-ce qu’on connaît du point de vue français ?

Jean-Louis Bouet-Leboeuf :
Il y a une étude menée actuellement par l’OHI (Organisation Hydrographique Internationale) qui devrait sortir l’année prochaine. Il existe une publication « Publication S55 » qui est l’état de la connaissance hydrographique et de la cartographie marine. C’est cette dernière qui sera réactualisée.

En métropole, il y a encore des zones où la connaissance hydrographique est largement insuffisante. Je pense que c’est de l’ordre de 95 % et les 5 % qui restent ne sont pas les plus faciles, zone côtière Bretagne par exemple. En plus, ce sont des levés dits modernes, c’est-à-dire au sondeur vertical avec des méthodes qui n’étaient pas aussi précises qu’on peut les faire aujourd’hui, il faudrait quasiment toutes les refaire. J’ai évoqué ce matin le référentiel littoral qui est à l’étude en coopération entre le SHOM et l’IGN et dont des tests vont être menés dans le golfe du Morbihan avec le laser, mais ce laser a une portée en profondeur limitée mais c’est quand même la zone la plus difficile et donc si le programme est monté, ça permettra d’avoir un référentiel littoral pour la zone métropolitaine. Le plus inquiétant, ce sont les zones des départements et territoires d’outre-mer. Aujourd’hui, il y a des moyens, mais y-a-t-il la volonté d’y aller, c’est une autre histoire ! En Polynésie, par exemple, elle est normalement maître de son hydrographie mais elle n’a pas de service, ce qui pose un problème.

Il existe un programme d’extension du plateau continental qui est piloté par Ifremer et, dans ce cadre-là, il y aura beaucoup de campagnes à mener. La date limite de dépôt des dossiers est 2009 et je ne sais pas si on aura fini les dossiers parce que pour faire les dossiers, il faut des données, à la fois bathymétriques (en Océan indien, par exemple, ce n’est pas simple) et à la fois sur les profondeurs de sédiments et pour celles-là aussi, il y a des choses à faire ; de plus, il faut s’entendre avec les voisins lorsqu’il y en a.

Etienne Cailliau :
En 1977, nous avions fait une étude à l’ONU pour aboutir au chiffre de 2 % de connu. Une nouvelle étude vient d’être faite dans le cadre de la carte bathymétrie générale des océans pour arriver à 25 %. C’est tout de même remarquable de passer de 2 à 25 %.

Yves Lancelot :
Dans le contexte actuel, un peu alarmant, que nous a présenté Anne-Marie Alayse sur le temps navire disponible, la tentation est toujours de faire une recherche beaucoup plus ciblée, disons « utile », par rapport à la recherche pratiquée dans les années soixante, mais on n’aurait pas découvert la tectonique des plaques, on n’aurait pas découvert non plus les principaux enjeux de la paléoocéanographie. Quand j’ai pris moi-même la première carotte record (53 mètres) à bord de l’ancien « Marion Dusfresne », sur une campagne de 28 carottes, on a obtenu une, peut-être deux carottes qui ont été absolument exceptionnelles. Et on ne savait pas à l’avance qu’elles allaient être aussi rentables. Quand je suis rentré, compte tenu du nombre de carottes, on nous disait que, peut-être, il était temps d’arrêter d’accumuler ces carottes. J’ai répondu que l’exploration demande une approche différente de la plupart des sciences, peut-être plus « établies ». La géologie des Alpes ou du Tibet par exemple continue de mobiliser des géologues en permanence qui peu à peu font des découvertes majeures, poussés par des idées nouvelles. On ne dit pas : on fait les Alpes, puis les Pyrénées, etc. Ce n’est pas comme ça que marche notre science. On est encore dans une phase d’exploration et il faut accepter de temps en temps d’avoir, à côté d’une recherche ciblée, une recherche beaucoup plus étalée et ouverte. Il se trouve que lorsqu’on a obtenu une masse critique de données, d’un seul coup se cristallise quelque chose. Certaines données se sont révélées utiles au bout de plusieurs décennies. Il faut faire très attention dans l’acquisition des données. Il ne faut pas se restreindre et dire que nous n’allons faire que de la recherche ciblée, surtout quand la tentation est là, avec la réduction de temps navire que l’on vient de nous présenter. Cette recherche ciblée est très tentante parce qu’elle apparaît plus rentable, mais c’est encore une illusion. Malheureusement, c’est devenu courant dans la plupart des pays européens, alors que les Américains ont gardé une politique d’acquisition de données beaucoup plus élargie que celle qu’on est tenté de faire en Europe.

Gérard Riou :
Je ne voulais pas dire que la recherche appliquée que je citais au travers de l’exemple de l’océanographie opérationnelle a vocation à se substituer à de la recherche fondamentale, ce n’était pas le but. Je voulais attirer l’attention sur le fait qu’il y a un champ de connaissance extrêmement important à développer parce que nous ne connaissons pas bien les océans aujourd’hui et on a besoin, c’est clair, de recherche fondamentale qui ne relève pas du tout de problématique de recherche ciblée. À côté de cette recherche fondamentale, il faut tenir compte d’un certain nombre de grandes évolutions et il faut qu’on s’intègre dans des programmes de recherche finalisée. Dans le cadre de ces programmes de recherche, faut-il avoir des données effectivement acquises qui ne s’intègrent pas dans des programmes de modélisation ? Oui, c’est d’ailleurs en ce sens que j’ai marqué mon désaccord vis-à-vis de monsieur Cailliau quand il disait qu’on ne devrait pas avoir de données qui sont acquises si elles ne rentrent pas dans des programmes de modélisation et j’ai rectifié en disant qu’on ne devrait pas avoir de données qui ne rentrent pas dans le cadre de programme où il y aura une interprétation scientifique de ces données et c’est une chose totalement différente. Il existe encore de la donnée qui est parfois acquise et dont on ne fait strictement rien après. Je crois qu’il faut qu’on s’interroge sur la nécessité de le faire. Il faut garder notre capacité de découverte et d’exploration et d’ouverture par rapport à des choses que l’on n’image pas, pour être capable de faire des découvertes majeures.

Jean Francheteau :
Je souhaite faire une remarque et poser une question. J’ai remarqué sur le tableau d’Anne-Marie Alayse que le nombre de jours d’affrètement avait été multiplié par dix en six ans. On utilise des navires de recherche à faire autre chose que la recherche dix fois plus qu’il y a 6 ans. Le temps bateau pour la recherche a quant à lui diminué fortement. Ceci n’est pas sans soulever un certain nombre d’inquiétudes. Est-ce que l’on peut avoir une politique de recherche océanographique vivante si on accepte de diminuer le temps consacré à la recherche de manière aussi importante ?

J’ai une question pour Gérard Riou : quel est le poids réservé à l’océanographie opérationnelle dans les programmes de l’IFREMER ?

Gérard Riou :
Effectivement, on constate qu’il y a une augmentation importante au travers des chiffres présentés sur les dernières années. Ces chiffres doivent faire l’objet d’une analyse un petit peu plus fine, avant d’en tirer des conclusions définitives. À l’intérieur de ces affrètements, on va trouver des campagnes qui sont en coopération avec des industriels.

Anne-Marie Alayse :
Il y a une colonne pure affrètement et une colonne appelée affrètement scientifique, par exemple les campagnes biozaïres ne sont pas dans les affrètements. Les campagnes halieutiques sont dans les coopérations scientifiques. Les autres sont des affrètements purs.

Gérard Riou :
La campagne qu’on vient de réaliser par exemple avec la société Total va relever de programmes qui peuvent être conduits en commun. Sur ce type de programmes, on trouvait un intérêt scientifique. C’était une occasion d’avoir à la fois des sources nouvelles de questionnement et d’avoir la possibilité également pour nous d’accéder à un certain nombre de moyens ou de possibilités pour développer des recherches sur des thématiques qui existaient déjà chez nous avant. Il y a des phénomènes conjoncturels aussi qui se sont produits : une tension de plus en plus importante sur les budgets de la recherche, surtout cette année, qui s’est traduite par des réductions de campagne scientifique comme on n’en avait pas connu les autres années. C’est clair que ça a fait monter de façon importante le pourcentage d’affrètements. On peut quand même espérer pour l’avenir que ce ne soit pas une situation qui dure indéfiniment et que ça ne se traduise pas par une politique qui perdure avec cette réduction de campagnes scientifiques. Il faut maintenir un équilibre et on devra trouver cet équilibre entre ces programmes qui sont en coopération avec des affréteurs, que ce soit des centres de recherche étrangers, des États, des entreprises industrielles, il ne faut pas le rejeter a priori parce que ce sont des affrètements. Au travers de ceux-ci, il n’y a pas que de la prestation pure et dure telle qu’une société de services serait capable de le faire. Il y a également des cas où on peut y trouver un intérêt scientifique. C’est également des questionnements, des gens auxquels on est obligé de se confronter et c’est aussi l’occasion pour nous de nous améliorer. En janvier 2002, nous avons réalisé une campagne de sismique pour la société Total : aucun intérêt scientifique mais un intérêt financier. Après cette campagne, on a trouvé un intérêt sur le plan de l’amélioration de nos méthodes parce qu’on était confronté à des gens qui font de la sismique d’une façon dont les chercheurs ne la pratiquent pas et donc ils nous ont posé un certain nombre de questions, ont fait un certain nombre de critiques quant à la mise en œuvre de nos équipements, à l’opérationalité de ce que l’on faisait, à la fiabilité d’un certain nombre d’équipements, à la productivité de la donnée acquise par kilomètre. Critiques qui n’ont pas manqué de nous interpeller et nous avons fini par réviser nos procédures de mise en œuvre, par acquérir des équipements nouveaux, par essayer de mettre en œuvre des procédures nouvelles qui finalement se font au bénéfice des scientifiques qui utilisent la sismique sur l’ensemble de nos navires. Au bout du compte, ça s’est traduit par une rénovation.

Sur l’océanographie opérationnelle hauturière, nous avons des équipes qui interviennent à plusieurs niveaux, d’abord au niveau de la recherche pour contribuer à l’accroissement de la connaissance qui va se positionner en amont. Ce sont les chercheurs qui travaillent dans le laboratoire de physique des océans et qui, au travers du développement de la connaissance sur certains processus, vont contribuer à l’amélioration des modèles après. On y contribue au travers du développement instrumental. On a développé des flotteurs dérivants profilants qui sont utilisés aujourd’hui. On a développé des systèmes qui améliorent l’acquisition automatique sur les navires. Également, on gère le centre de données Coriolis. Ce sont Ifremer et nos partenaires. On voit bien que les chiffres peuvent être extrêmement variables, suivant qu’on les utilise en terme financier, en nombre de personnes... En terme d’océanographie côtière et de programmes futurs, il y a des équipes qui travaillent, qui sont déjà très impliquées aujourd’hui sur la modélisation littorale et côtière, à la fois dans le domaine de la physique mais également dans le domaine de la biologie.

Brigitte Bornemann-Blanc :
Comment le programme CLIVAR est-il financé et est-ce que sa pérennité est assurée ? S’il y avait besoin de prolonger des recherches, comment seraient-elles financées ?

Howard Cattle :
Le programme CLIVAR se divise en diverses organisations. Le bureau dont je suis le directeur est financé essentiellement par des dons nationaux, par l’Angleterre et la France et par les États-Unis. Le CLIVAR en lui-même n’est pas un organisme qui est financé, mais plutôt un organisme de coordination de projets. C’est souvent sur le fil du rasoir que nous obtenons les fonds nécessaires à la bonne marche des projets. Le CLIVAR bénéficie de fonds nationaux et son activité est essentiellement de coordonner différents programmes tels ARGO...





Mis à jour le 29 janvier 2008 à 11:22