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1999 : de l’animal à l’homme > TR 6 : L'expérimentation animale >  Synthèse du débat délibératif: Jean-Paul Natali

Synthèse du débat délibératif: Jean-Paul Natali

Chargé de mission Cité des Sciences et de l'Industrie

Biographie :

NATALI Jean-Paul

Compte rendu :

Transcription :


23 octobre 1999 TR6


Discours de Jean-Paul Natali :


Pour que les choses soient bien en place et montrer que c’était une tentative, une expérimentation, que ça n’avait pas les objectifs politiques directs que pouvaient avoir une conférence de citoyens ou de consensus organisée dans d’autres contextes, mais que pour nous c’était très important de savoir quelles étaient les types de pratique et de dynamique qui allaient se mettre en place, autour de cette démarche. Nous avons organisé ces tables rondes, dialogues avec les experts. Ceux-ci ont travaillé avec les citoyens, en essayant de vulgariser, de pouvoir donner, malgré la complexité des savoirs scientifiques, se faire comprendre et pouvoir vraiment échanger, avec les citoyens. Magali Galant a été mon assistante pour cette opération et facilitatrice de cette rencontre, elle est philosophe de formation. Je vais demander aux citoyens de présenter leur texte, ce texte est un texte formel, c’est à dire jusqu’à hier encore, nous avons travaillé sur tous le termes de façon à ce que ce soit très précis. Ce texte est en fait la conclusion, le résultat, et ces cinq personnes sont des signataires de ce texte. Le panel exprime ses remerciements aux entretiens scientifiques de Brest et La Cité des Sciences et de l’Industrie d’avoir été à l’origine de cette rencontre délibérative. Dans le présent document, le panel s’est efforcé de synthétiser les connaissances acquises. Les membres du panel tiennent à remercier vivement les intervenants, pour la qualité et la clarté de leurs exposés. Ils remercient aussi les facilitateurs Jean Paul Natali et Magali Galant, pour l’encadrement du groupe et leurs attentions à aider leurs acquisitions de connaissances, 3 B conseils pour l’organisation des rencontres avec les experts. Le panel a beaucoup apprécié la disponibilité des intervenants invités ainsi que leur clarté. Tous les membres du panel partagent le sentiment d’avoir participé à une expérience unique qui tente à améliorer le débat démocratique, le panel estime, à cet égard que cette démarche méritera d’être renouvelée, chacun a pu se rendre compte à travers cette expérience qu’il était extrêmement difficile d’émettre des avis tranchés sur un sujet aussi important, l’étude approfondie de ce sujet nous a permis de voir que l’on ne peut déclarer simplement être pour ou contre l’expérimentation animale. Le panel se reconnaît dans l’image employée par la philosophe Janine Chanteur qui montre qu’en la matière, dès que l’on prête un peu d’attention aux différents arguments, on est sur le fil du rasoir. Les discours se contredisent sur cette question et il est très difficile de se faire une opinion, lorsque l’on est profane. Les exposés utilisent les mêmes arguments, les conclusions s’avèrent être différentes. L’expérimentation animale, qu’il s’agisse de santé humaine ou de toute autre chose, pose de véritables questions éthiques. Elle s’inscrit dans un contexte économique, politique, sociale et culturelle, dont on ne peut faire abstraction, la synthèse présentée ici l’est au vue de connaissances actuelles, elle s’inscrit dans un présent et un contexte qui concerne les citoyens d’aujourd’hui, elle n’est valable que dans un cadre contemporain au moment de ce travail. De nouvelles découvertes, l’évolution de la société, rendront certainement caduques certaines de nos considérations. Le panel dans son ensemble, malgré des sensibilités différentes est d‘accord pour dire qu’à l’heure actuelle, il n’est pas possible d’arrêter les pratiques expérimentales sur les animaux. Les progrès fulgurants de la biologie, nous incitent à penser que le nombre d’expérimentations sur les animaux, risque de s’accroître dans les années à venir. Dans le même temps, le respect de l’animal est un problème de plus en plus important dans l’opinion publique.

Je vais vous parler de l’expérimentation dans le cadre de l’alimentation.

Les expérimentations et leurs conséquences. Il me semble important de souligner le fait que l’expérimentateur répond à des attentes de société lorsqu’il pratique ces expériences. Les expérimentations répondent aux attentes des consommateurs. Dans ces observations, sur les lieux de l’expérimentation, le panel a bénéficié de la visite d’un seul laboratoire de recherches appliquées aux animaux destinés à l’alimentation. Le laboratoire de l’AFSSA, à Ploufragan. Ce laboratoire a un statut assez exceptionnel en France. De plus, notre pays est un des plus sévères au monde en terme de législation et de condition d’expérimentation. Les conditions sanitaires y sont exception-nelles. La question reste posée en ce qui concerne les laboratoires privés des industriels de l’alimentation, l’association que fait le public, entre le bien-être de l’animal et la qualité de la viande, n’est toujours pas vérifiée à l’heure actuelle par les expériences menées en laboratoire.

Le contrôle des expérimentations. Des contrôles vétérinaires sont effectués tout au long de la chaîne d’expérimentation par des personnes du domaine. Le Ministère de l’Agriculture est au bout de la chaîne des contrôles et tranche en cas de litiges. Les profanes ne savent rien de l’indépendance de ce système. Cela donne l’impression de rester très interprofessionnel et assez fermé. On peut donc se demander si les résultats positifs quant à l’amélioration de la qualité de vie des animaux d’expérimentation à des fins alimentaires sont fondés. Tout semble se faire en interne, les sanctions semblent sévères, c’est une sévérité que les profanes jugent nécessaires. Là encore, ils ont pu vérifier leur application et n’émettre aucun jugement sur les conditions d’application des règles en situation d’expérimentation.

La législation : Elle nous paraît satisfaisante dans les grandes lignes, on ne peut pas vérifier son application, elle est satisfaisante en tant que telle, mais elle est difficile pour le grand public de vérifier son application. Les contrôles semblent se faire de façon trop interne.

Les interrogations d’ordre général : En ce qui concerne les animaux génétiquement modifiés, le panel n’a pas eu de réponses claires, les experts lors du débat ont avoué leur incompétence et leur absence de connaissances précises sur le sujet. Le groupe de citoyens tient à remarquer sa difficulté à se faire une opinion sur cette question, et à départager la véracité ou la fausseté de toutes les informations qu’on trouve à ce sujet dans la presse. Le panel ne souhaite pas juger des valeurs nutritives ou de qualités du produit, mais simplement pouvoir accéder à des informations et des précisions, que l’on peut juger sérieuses, sur les conditions d’expérimentation qui ont donné naissance à tel ou à tel produit.

L’expérimentation animale dans le cadre de la santé humaine. Comme cela a déjà été souligné en introduction, le panel s’accorde pour dire qu’on ne peut pas se passer de l’expérimentation, sur les animaux, à l’heure actuelle, si des expériences ne requièrent pas nécessairement l’expérimentation des animaux, alors des moyens de substitution doivent être utilisés : l’informatique, culture cellulaire etc. On remarque que de grands progrès ont été faits sur les conditions d’expérimentation. Cela a paru être encourageant au groupe de profanes. Le contrôle des expérimentations depuis la loi de 1986, mis en place par Hubert Curien, a permis que dans des laboratoires, des taudis d’animaux aient quasiment disparu en France. Bien qu’il y ait encore quelques rares exemples. Le panel s’accorde pour préconiser l’utilisation des méthodes alternatives et souhaitent que ces méthodes soient utilisées de préférence dans les phases préalables dans l’expérimentation chaque fois que cela est possible. Les profanes ont pu visiter un laboratoire de culture cellulaire à l’U.B.O. à Brest et ont trouvé très intéressant le fait que l’on puisse éviter certaines expériences sur les animaux et les remplacer par de l’expérimentation sur les cultures cellulaires. Suite à leur rencontre avec les experts, les profanes veulent souligner le fait qu’à l’heure actuelle, beaucoup d’animaux sont sacrifiés pour les cultures. Exemple : 5000 souris sacrifiées, l’an passé, dans le laboratoire d’un des experts présents lors des rencontres délibératives. Les experts l’ont expliqué, dans le centre de recherches expérimentales, les bonnes pratiques de laboratoire sont de mise. Le principe est, j’écris tout ce que je vais faire et j’écris tout ce que j’ai fait. Dans l’idéal, les protocoles sont vérifiés et rejetés par des scientifiques et par des profanes, mais cela est loin d’être déjà appliqué partout bien que cela soit en train de se développer. Sur la législation, en cas de non respect, les contrevenants risquent le retrait de leur licence d’expérimentation, la fermeture de leur laboratoire, voir des peines de prison. La législation française, telle qu’elle a été présentée par les experts lors de la rencontre délibérative, semble très encourageante au profane. Elle est sévère au bon sens du terme mais ils n’ont pas pu vérifier son application et suspendre leur jugement sur ce point précis. En tant que telle, elle est souhaitable et suffisante, il ne voit pas ce qui pourrait être fait de plus, les experts ont en effet spécifié qu’il existait en France des chartes, des cahiers des charges applicables à tous les laboratoires d’expérimentation. Les profanes soulignent qu’ils n’ont pu vérifier cela et qu’ils ne peuvent donc assurer que ce soit fait partout. En ce qui concerne l’acceptable et l’inacceptable, il faut des limites. Celles-ci ne peuvent venir que de la société. La société tranche. C’est aux citoyens de se mobiliser. Les scientifiques réagissent selon des contraintes données par la société, ils ne sont qu’un des bras de celle-ci. Sur la rencontre avec des experts, il est confirmé que des pistes de recherches sont privilégiées ou non divulguées pour des raisons sociales, politiques, économiques, selon les attentes de la société. Les avancées techniques, technologiques ne doivent pas être d’emblée présentées comme des nécessités pour l’humanité. La consultation des citoyens leur paraît être une étape fondamentale dans l’application des découvertes scientifiques et techniques postérieures à l’expérimentation.

L’expérimentation scientifique dans le cadre de la connaissance scientifique fondamentale et de la formation matérielle didactique.

De nouvelles méthodes, dites alternatives, peuvent désormais être utilisées. Rat plastique, cultures cellulaires, elles permettent d’apprendre les gestes aux techniciens de laboratoire et aux chercheurs, ensuite il est nécessaire pour ceux-ci d’avoir un vrai contact avec l’animal, cela est même rassurant pour toute personne qui doit avoir une opération chirurgicale, il y a un équilibre à trouver, on peut raisonner entièrement, en termes de méthodes alternatives, mais on ne peut plus raisonner en termes d’expérimentation uniquement sur les animaux, lorsqu’il s’agit d’apprentissage. Selon l’inventeur du rat plastique, Solvay, il y a 80% d’animaux morts en moins par étudiant avec cette méthode. Les experts ont expliqué au panel, l’évolution des mentalités, dans le domaine de la recherche. Ils ont insisté sur le fait que beaucoup moins d’animaux sont sacrifiés par rapport à ce qui se faisait il y a 20 ans. Ils ont insisté aussi sur le rôle important de leur dialogue avec les associations de protection des animaux, malgré tout certaines choses paraissent inutiles au panel. Travaux de thèses surnuméraires etc. A priori cela leur paraît inutile et pratiqué en trop grand nombre, mais in fine, cela a certainement une utilité. L’expérimentation dans le cadre de l’industrie des cosmétiques. Madame Dorange nous a dit que les expériences de cosmétologie peuvent aujourd’hui se faire à 90% sur des cultures cellulaires. Mais la réunion avec les experts nous a donné l’informa-tion qu’à l’heure actuelle, cela est encore fait en partie sur des animaux notamment à cause de la législation.

En conclusion, nous voulons souligner, qu’à chaque fois que cela est possible, les scientifiques doivent éviter de recourir à l’animal pour effectuer ou valider leurs expériences. D’après les experts, les méthodes alternatives sont plus économiques, plus simples, plus pratiques et plus fiables. Dans le domaine de l’alimentation, nous souhaitons que le citoyen soit informé par un système d’étiquettes, de l’origine de l’animal qu’il est en train de manger. Le citoyen ne devrait pas avoir à remonter toute la chaîne d’élevage pour savoir quelle est l’origine expérimentale de la viande ou du poisson qu’il souhaite ingérer. La souffrance de l’animal pose au groupe un réel problème bien qu’il soit conscient que ce soit inévitable. L’économique a un rôle trop prégnant dans la prise de décisions relatives aux découvertes scientifiques touchant à la santé et à l’alimentation. La surpopulation va bientôt être un problème pour l’humanité, il nous semble que faire des expérimentations sur les animaux à des fins d’élevage intensif ne reposent pas sur la réalité des besoins humains, qui d’après les connaissances d’un des membres du panel sont faibles en protéine animale. La piste d’une alimentation riche en végétaux nous paraît intéressante. Elle répond aux besoins humains, elle est en phase avec la réalité des ressources naturelles de la planète, et elle éviterait les énormes problèmes de pollution, les élevages intensifs de viande et de poisson et de pillage de ressources naturelles de la planète, la pêche intensive etc. On se pose la question de la nécessité des régimes ne respectant pas l’ordre naturel de la chaîne alimentaire, exemple : la vache herbivore ne doit pas être nourrie de farines issues d’autres animaux. Suite à notre rencontre avec les experts, il paraît évident qu’un grand choix de société est à faire. Soit la sécurité des hommes passe en premier et l’on continue les expérimentations, soit le bien être des animaux est premier, dans ce cas, on limite les expérimentations sur les animaux. Le chercheur ne fait qu’agir dans un cadre fixé par la société. Dans tous les cas, la législation oblige à tester sur les animaux en respectant une hiérarchie qui va des cultures cellulaires au grand primate. Le nombre de primates utilisés en expérimentation va sans doute aller de façon croissante dans les années à venir. Un réel problème va se poser au niveau de l’opinion publique, quant à l’acceptation de la production de primates uniquement à des fins expérimentales. Voilà l’ensemble des conclusions auxquelles sont arrivées le panel des profanes. Je vais demander aux quatre experts qui sont présents de réagir à ces prises de position, à cette vision, je demanderai aussi à Madame Élisabeth de Fontenay de réagir également.






Mis à jour le 06 février 2008 à 14:30