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1997 : L’industrie nucléaire civile, les OGM > Clôture des débats >  Discours de René Bimbot

Discours de René Bimbot

Président du Comité Scientifique et d'Organisation des entretiens, directeur de recherche CNRS (IN2P3)
Secrétaire général du Haut Comité du Centenaire de la Découverte de la Radioactivité

Biographie :

BIMBOT René

Compte rendu :

Transcription :


18 octobre 1997 Clôture des débats


Discours de René Bimbot :


Le vingtième siècle a vu s’épanouir et se développer toutes les branches de la science, et de multiples technologies à qui elles ont donné naissance. Il en résulte que les applications de la science sont devenues omniprésentes dans notre société. Cependant, d’une façon quelque peu paradoxale, la culture scientifique des citoyens, et même de certains décideurs, ne s’est pas développée dans les mêmes proportions, et les scientifiques sont souvent restés, dans l’esprit des populations, des êtres lointains, enfermés dans leur laboratoire, et isolés par leur langage. Depuis plusieurs années, en réaction à cet état de fait, des opérations d’information scientifique et technique se sont développées, et en particulier la désormais célèbre "Science en Fête" qui fait sortir les chercheurs et s’ouvrir les "labos". Les "Entretiens Scientifiques", que nous venons de lancer, partent de la même préoccupation, établir un contact, une communication, entre les scientifiques et la société, mais souhaitent placer ce problème sous un angle particulier, celui des conséquences sociales des découvertes scientifiques, et surtout de leur mise en application. Dans ce domaine, une question cruciale est celle de l’éthique du chercheur, liée à celle de sa responsabilité. Or, si les scientifiques revendiquent une liberté maximum dans le choix de leurs thèmes de recherche, donc doivent accepter l’entière responsabilité de ce choix, il est difficile d’affirmer qu’ils soient totalement responsables de leurs découvertes, dont certaines constituent de véritables surprises. D’où l’image stéréotypée du chercheur-apprenti sorcier dépassé par la portée de ses trouvailles !

En fait, la mise en application des découvertes fondamentales suit un processus qu’il est intéressant d’analyser, et qui, partant de la simple connaissance scientifique, passe par la mise en oeuvre de nouvelles technologies, et aboutit à l’industrialisation et souvent à la commercialisation d’un procédé ou d’un produit. Et en même temps que s’opèrent ces transferts successifs, on assiste également à une dilution des responsabilités, ce qui permet d’affirmer qu’en fin de compte les applications industrielles des découvertes scientifiques sont du ressort de la société toute entière.

Mais pour pouvoir assumer ses responsabilités, la société doit être pleinement informée, et ceci ne peut se faire qu’en organisant des contacts entre tous les partenaires de ce cheminement. C’est à ce problème que les "Entretiens Scientifiques" se proposent d’apporter leur (modeste) contribution. D’où le sous-titre -aussi important que le titre, sinon plus : "Science et Ethique ou le devoir de parole". Ce devoir s’entend pour les chercheurs : devoir de s’exprimer, de faire comprendre du mieux possible les implications de leurs recherches, et de leurs découvertes. Opposé au fameux devoir de réserve, dont il est plutôt complémentaire, ce devoir de parole est à mettre en oeuvre avec tact, et à concilier parfois avec le secret des développements de recherche industrielle ou militaire. Ces points délicats entrent tout-à-fait dans le champ des discussions des "Entretiens Scientifiques".

À l’autre extrémité de la chaîne, le citoyen, qui utilisera ou se verra imposé les technologies nouvelles découlant des découvertes scientifiques a pour principal moyen d’action, hormis éventuellement son statut de consommateur (qui achète ou n’achète pas...), son bulletin de vote (dans les pays démocratiques). C’est ici que le politique prend toute son importance. Le politique représente le citoyen dans la prise de décision précédant toute mise en application de technologies nouvelles d’une certaine importance. Il doit être informé à la fois des aspects scientifiques et techniques, des conséquences pour la santé publique des technologies en question, mais aussi de l’opinion des citoyens dont il est le porte-parole. Et c’est par des lois et des décrets que s’exprimeront les décisions qui auront ainsi été prises.

C’est pourquoi le Comité Scientifique et d’Organisation des "Entretiens Scientifiques" s’est préoccupé de mettre en présence tous les partenaires impliqués dans ce processus, scientifiques de plusieurs disciplines, agriculteurs et industriels, hommes politiques et juristes, pour des conférences et débats publics, c’est-à-dire se déroulant en présence de citoyens désireux de s’informer et d’intervenir dans les discussions. Parmi ceux-ci, mentionnons les jeunes, et en particulier les étudiants qui seront les acteurs de la société future.

Fort du soutien de deux ministères et de l’U.N.E.S.C.O. qui ont accordé leur Haut Patronage, d’un Comité de Parrainage constitué de personnalités et d’organisations prestigieuses, le Comité Scientifique et d’Organisation a choisi de bâtir ces premiers entretiens sur deux journées, la première étant consacrée à l’analyse du processus menant "de la découverte aux applications", la seconde aux liens entre "éthique, risque et politique". Afin de placer les explications et débats sur un plan aussi concret que possible, il a été décidé de les illustrer à partir d’exemples. Ceux-ci ont été tirés de deux domaines bien distincts, l’industrie nucléaire civile et les biotechnologies.

Le premier de ces domaines représente une industrie largement développée en France et à l’étranger depuis une cinquantaine d’années, sur la base de découvertes fondamentales qui se sont échelonnées elles-même sur quarante ans, de la découverte de la radioactivité, dont on célèbre actuellement le Centenaire, à celle de la fission en 1939. Si elles ne sont pas toutes résolues, les questions qui se sont posées lors de sa mise en oeuvre, ou du fait de son développement, peuvent néanmoins être abordées et analysées avec un certain recul. Pour ce thème, il a été choisi de centrer les débats autour d’une question d’actualité, qui est le devenir des déchets nucléaires.

Le second domaine, la génétique, est d’un développement beaucoup plus récent ; les techniques correspondantes sont en cours de mise en application, et il a été choisi de traiter particulièrement d’exemples relatifs aux organismes génétiquement modifiés (O.G.M.), dont l’actualité est parfois brûlante. Tout comme le premier, il comporte des avancées techniques et économiques fantastiques, associées à des risques potentiels assez difficiles à cerner. La mise en parallèle des expériences de ces deux domaines ne pouvait manquer d’être fructueuse. Le choix de deux disciplines si différentes avait aussi pour avantage de provoquer la rencontre de deux communautés évoluant généralement dans des sphères séparées, et n’ayant pas souvent l’opportunité de confronter leurs points de vue.

Pour tenir ces premiers "Entretiens Scientifiques", la ville de Brest a été choisie. Il paraissait important en effet que ce soit une ville universitaire, regroupant des collectivités territoriales menant une politique de valorisation de la recherche, des laboratoires de recherche, ainsi que des grandes et des petites industries. Il était également souhaité que ces entretiens aient une résonance nationale, et cet objectif a été atteint grâce au partenariat de grands médias, le journal "Le Monde", la revue "La Recherche", et "France Culture" qui ont animé deux débats enregistrés et radiodiffusés, prolongeant les "Entretiens Scientifiques" dans l’espace et dans le temps... Enfin, l’Ecole Nationale Supérieure des Télécommunications de Brest a mis en oeuvre un serveur Internet susceptible de prolonger également les débats à une échelle... planétaire !

Les comptes-rendus qui font l’objet de ce livret sont destinés à laisser une trace de ces rencontres dont beaucoup de participants se sont déclarés satisfaits. Ils comportent notamment une synthèse des débats, aussi objective que possible, mais comportant les risques inhérents à sa nature, et les textes intégraux fournis par les auteurs de certaines des interventions.

En conclusion de cette présentation, il nous faut remarquer que des exposés et débats s’adressant à un aussi large panel de participants et devant un public d’origines aussi variées, ne pouvaient être menés que dans un langage excluant autant que possible les termes trop spécialisés, le "jargon" propre à chaque discipline. Pour la qualité des débats, il était essentiel également d’accepter la discussion de tous les problèmes, y compris les plus délicats en proscrivant toute "langue de bois". A l’issue de ces premiers entretiens, il est agréable de constater que cet objectif a été atteint de façon satisfaisante, et ce fait est à porter au crédit de tous les participants, que nous avons plaisir à remercier ici.

Il convient enfin de rendre hommage au Cabinet 3B Conseils qui a pris l’initiative de créer les "Entretiens Scientifiques", et en a assuré le montage financier et la réalisation matérielle.






Mis à jour le 08 février 2008 à 11:30