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1997 : L’industrie nucléaire civile, les OGM > TR 5 : Ethique et risque >  Discours de Jean-Pierre Ecalard : Organismes Génétiquement Modifiés (O.G.M.) et nutrition

Discours de Jean-Pierre Ecalard : Organismes Génétiquement Modifiés (O.G.M.) et nutrition

Directeur scientifique, Groupe EVEN

Compte rendu :

Transcription :


18 octobre 1997 TR 5 : Ethique et risque


Discours de Jean-Pierre Ecalard :



Il n'est pas possible d'occulter l'arrivée des O.G.M. Ainsi aux U.S.A., les premières plantes transgéniques ont été commercialisées en 1996. De 1996 à 1997, les emblavements sont passés de 4 à 12 millions d'hectares. (soja "Roundup ready" de Monsanto = 3,6 millions d'ha = 15 % du soja).

L'arrivée du maïs transgénique américain a soulevé quelques émotions en 1996-1997. En octobre et novembre 1996, une enquête d'opinion "Eurobaromètre 46-1" demandée par la Commission Européenne a conclu que 80 % des européens estiment que la biotechnologie est "utile" pour améliorer la détection des maladies héréditaires par des tests génétiques et pour la production de médicaments mais que l'application aux aliments (fruits et légumes) et l'introduction de gènes humains dans les animaux sont considérés comme "moins moralement acceptables" par 70 % d'entre eux. Moins de 25 % estiment que la réglementation actuelle est suffisante pour protéger l'homme. Dans l'esprit de Levi Strauss qui pense que ce qui est important ce n'est pas ce que l'on donne à manger mais ce que l'on donne à penser, on peut se poser cette triple interrogation :
- A quoi servent les O.G.M. ?
- Présentent-il un risque nutritionnel, de santé ou social ?
- Que pouvons-nous proposer ?


Domaines d'application ayant une incidence nutritionnelle

Cette liste non exhaustive est donnée à titre d'exemple.

Les végétaux

En ce qui concerne les végétaux, les caractères introduits ont pour cible, le plus souvent, les applications suivantes :

- Résistance aux virus,
- Résistance aux herbicides, insecticides,
- Résistance aux insectes,
- Résistance au stress : sécheresse, froid.
- Gestion des facteurs de croissance,
- Modification de la composition en acides gras (acides gras polyinsaturés) et en acides aminés (méthionine, lysine, tryptophane, cystéine)
- Production d'enkephaline,
- Augmentation de la teneur en amidon,
- Production de sérum albumine humaine et d'immunoglobulines,
- Changement de coloration des pétales,
- Elimination de substances antinutritionnelles.


Les animaux

Pour ce qui est des animaux de rente, les travaux concernent surtout les objectifs suivants :

- Surexpression des gènes d'hormone de croissance et qualité des viandes.
On va ainsi viser des performances zootechniques et le maintien du meilleur état sanitaire. C'est ce que l'éleveur cherchait de tout temps à faire par la sélection génétique. On va ainsi obtenir des animaux moins sensibles au stress et aux maladies, ayant une viande plus maigre (porc), des volumes de production plus importants (lait, laine, œuf) et une meilleure croissance (augmentation de la masse musculaire).
exemple : surexpression du gène de l'hormone de croissance porcine (PGH) par modification du patrimoine génétique des animaux par insertion de gènes ou d'ensemble de gènes impliqués dans différentes fonctions physiologiques ou immunologiques.

- Amélioration de la production de laine
objectif : faire produire chez l'animal un acide aminé, la cystéine, ou son précurseur la méthionine indispensable à la production de laine et que l'animal ne sait produire.

- Modification de la composition du lait
lait maternisé aussi proche que possible du lait humain,
lait à caséine plus petites faciles à digérer,
diminution de la teneur en lactose,
modification des lipides (production d'acide eïcosapentaenoïque),
Une pathologie liée à l'expression incontrôlée du gène a été observée dans de nombreux cas. On a ainsi observé chez le mouton des anomalies physiologiques (diabète par exemple).

- Résistance à des agents infectieux
Implication dans les mécanismes d'acquisition de résistance immunitaire ou autre.
Expression de transgènes d'anticorps hétérologues (protection sans immunisation préalable)
exemple : résistance à des ADENOVIRUS
résistance aux facteurs du milieu, notamment la température
production de protéines hétérologues dans le lait
exemple : production d'activateur humain du plasminogène
facteur IX de la coagulation
production de protéines hétérologues dans le sang
Hémoglobine humaine chez le porc (50-60% d'hémoglobine humaine et 50-40 % d'hémoglobine du porc).


Transgénèse et santé humaine

Trois exemples :

- Les xénogreffes
Tissus aux cellules produites par des animaux et destinées à l'homme qui devront être porteuses de gènes destinés à éviter leur rejet par l'organisme humain.
Le cochon présente de grandes similitudes physiologiques et anatomiques avec l'homme. C'est pourquoi on espère à partir du porc, dont on connaît bien la génétique, créer des lignées transgéniques germ free susceptibles de fournir des tissus et des organes compatibles (histocompatibilité).
Ces lignées spécifiques germ free histocompatibles devraient permettre de diminuer très significativement le risque d'infection virale. En effet, les greffes d'organes d'animaux sur l'homme comportent un risque d'infection virale, selon une étude de chercheurs britanniques. Les équipes londoniennes des professeurs Jonathan P. Stoye et Robin A. Weiss émettent des craintes sur ce risque de la "xénotransplantation" (greffe d'organes d'animaux) "Nature". En effet, ces risques sont tout aussi présents avec les greffes d'organes humains.

- La thérapie génique
Traitement de maladies incurables (hémophilie, mucoviscidose) ou dangereuses (cancer) par introduction dans les tissus malades d'un gène dirigeant la synthèse d'une protéine rétablissant ainsi une fonction cellulaire en remplacement d'une molécule déficiente. On peut parler de "gènes-médicament". Le vecteur, souvent un virus, est remplacé par des vecteurs artificiels comme les liposomes.

- Résistance aux antibiotiques
Les antibiotiques ont entraîné une résistance aux bactéries.
On a pu constater des résistances aux salmonelles, staphylocoques dorés et coliformes fécaux. La suppression des antibiotiques dans les aliments pour animaux est souhaitable à terme. Cette utilisation représente 50% des antibiotiques. Des animaux résistant à ces souches sont donc d'intérêt.


O.G.M. et sécurité nutritionnelle

Mais ces produits alimentaires issus d'O.G.M. présentent-il un danger pour l'homme ?

Rappelons le rôle de l'alimentation dans les grands problèmes de santé publique : cardiopathies coronariennes, maladies cérébro-vasculaires, diabète, obésité, cancer, cirrhose du foie, ostéopathie, anémie nutritionnelle, goître.

Ces O.G.M. présentent un intérêt nutritionnel.

L'impact de la transgénèse pour les produits alimentaires et non alimentaires issus de l'agriculture est important.

Pour mémoire, citons la production de matières premières renouvelables face à la diminution des réserves fossiles (énergie : bois, amidon, sucre, paille), un recours alimentaire devant l'accroissement démographique et une diminution des pertes.
exemple : En 1987, les pertes dues aux végétaux = > 100 Md de dollars = CA des industries agro-alimentaires françaises (I.A.A.).

C'est une chance pour le Sud, probablement si l'on respecte le stock génétique naturellement existant et les coutumes sociales.
- aptitude des plantes à une transformation en I.A.A.
exemple : nouvelles amylases dans l'orge pour la maltérie et dextrane saccharose pour la betterave.
- stabilité ou stockage par des enzymes capables de détruire les formes activées de l'oxygène (stress oxydatif).
- mycotoxines et toxines bactériennes par inhibition de ces dernières.

C'est un problème de sécurité alimentaire.
- faciliter la digestion humaine et animale en développant dans les plantes des enzymes actives seulement au PH acide de l'estomac
- introduction de marqueurs biochimiques pour la sécurité alimentaire
exemple : enzymes utilisant des substrats chromogènes développant une réaction colorée si rupture de la chaîne du froid.
- modification chimique des fibres.

Il faut donc étudier pour vérifier que les modifications apportées soient compatibles avec la nutrition, l'activité physiologique recherchée et n'ont pas d'effets secondaires.

On peut penser obtenir des produits plus équilibrés sur le plan nutritionnel pour l'alimentation et plus apte a la conservation.

La résistance va permettre de réduire l’utilisation de produits chimiques dont certains sont fortement toxiques.

La lutte par transgénèse de certaines viroses des plantes peut permettre d'éviter la disparition de certaines espèces.

Les aliments issus de plantes ou d'animaux transgéniques posent le problème de savoir si la modification entraîne des actions directes et indirectes qui pourraient modifier la composition de l'aliment et nuire à sa consommation – sans oublier que la transgénèse poursuit les mêmes objectifs que la sélection traditionnelle.

Pour illustrer ces propos, prenons le cas du maïs ou du soja : pour lutter contre certains parasites ou résister à certains herbicides, on fait exprimer par 10 plante une protéine étrangère par transgénèse. Que devient cette protéine ingérée par l'homme ou les animaux ?

En France, la culture de plantes transgéniques est interdite, sauf semence hybride colza et chicorée non utilisée dans l'alimentation.

Pour être accepté sur le plan nutritionnel, ces aliments doivent avoir une totale innocuité tout en apportant un nutritionnel.

On devrait parallèlement pour bien vérifier leur innocuité vérifier que les protéines d'expression des gènes ne présentent pas de caractères allergènes.

Ces études nutritionnelles prendront en compte le nutriment et celui transformé après impact technologique (I.A.A. ou domestique). Les examens seront tant expérimentaux que cliniques et sur des périodes longues. On vérifiera tant les effets de carence que de surdosage, de biodisponibilité des oligo-éléments et des incidences métaboliques et physiologiques.


Le législateur a prévu les sécurités suffisantes :

Les Guides
normalisation d'un nombre suffisant de guides de bonnes pratiques.
dispositif "d'assurance qualité" en matière de sécurité
Ces mesures contribuent à la sécurité du consommateur, des travailleurs et de l’environnement.

Les Comités et Commissions Nationales
- Comité Consultatif National d’Ethique
Avis sur toutes les applications à l'homme des récentes découvertes en matière de génie génétique
- Commission de Génie Génétique
Chargée de l'expertise scientifique des O.G.M. et des procédés d'obtention de ces organismes
- Commission de Génie Biomoléculaire
Avis sur les questions relatives aux risques et aux conditions d'emplois des produits issus des O.G.M.

En conclusion, la transgénèse présente d'évidents bénéfices pour l'homme et la société : c'est une chance qui nous est offerte.

Cependant nous devons rester vigilants. Ainsi, pour les plantes, certains avancent des menaces sur la diversité biologique ou sur l'équilibre des écosystèmes. Pour les animaux, si la transgénèse doit améliorer notre nourriture, nous devrons connaître les effets de cette nourriture issue des O.G.M. sur l'organisme humain.

Il ne faut jamais oublier que la transgénèse doit se développer dans le souci du bien-être de l'homme et non dans l'aboutissement de la réalisation de quelques périlleux fantasmes.






Mis à jour le 14 février 2008 à 10:52