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Discours de Patrice Desclaud : Modèle socio-technique capitaliste et solutions alternatives

Directeur de la Direction du Développement, services et réseaux, Direction régionale de France Télécom, Quimper

Biographie :

DESCLAUD Patrice

Compte rendu :

Transcription :

19 octobre 2001 TR2


Discours de Patrice Desclaud



Je vais être très clair. Je suis un vilain capitaliste d’une grosse SA qui a des actionnaires et donc des objectifs capitalistiques comme n’importe quelle entreprise. Le gratuit, vous avez vu ce que cela donne. Il y a 35 ans sur Rennes dans le domaine socio-technique du retour son de la télé par le câble, qui existait au Canada, on pouvait accéder, par l'image, à un conseil municipal. On pouvait y participer à travers un micro. À l’époque, le Président de la République de Gaulle n’a pas souhaité qu’on puisse le faire en France. Il ne faut pas être naïf, il y a des lobbies, des groupes de pression à tous les niveaux. Cela n’est pas nouveau, Internet est un autre média, mais sur le fond, le même problème se pose aujourd'hui.
Concernant l’ADSL, le mot A veut dire asymétrique, c’est un protocole très technique qui fait de la répartition de bandes : sur une même paire de cuivre, ce patrimoine de cuivre qui existe chez 34 millions d’abonnés en France, on répartit le spectre de la bande. Il y a davantage de bande pour ce qui vient du serveur et moins pour ce qui vient de l’internaute ; une autre partie de la bande permettant de téléphoner tout en surfant, ce qui est impossible avec une connexion modem classique. On ne peut pas faire plus : ce sont les lois de la physique pour un support de type donné. Aujourd'hui, en ADSL, on ne peut aller à plus de 4 mégabits par seconde en moyenne, à 4 km d’un répartiteur. Un certain nombre de Français et de territoires français sont et resteront donc d'emblée exclus de l’accès à l’ADSL.


La répartition de la bande par ADSL correspond à 90 % aux usages des internautes : ils envoient quelques textes, c'est-à-dire très peu et reçoivent beaucoup en terme d’images… C'est un modèle socio-technique asymétrique. On peut le contourner par le XDSL, le ISDSL, etc. mais le prix n'est pas le même. En ce qui concerne la politique de France Télécom sur l'ADSL, notre président l'a dit clairement : on espère 500 000 abonnés d’ici fin 2001, pour une couverture potentielle de 55 % des Français (pas du territoire) ; on devrait couvrir 70 % des Français fin 2003. Les politiques ont pris des décisions de principe par rapport aux couvertures associées, au dernier Comité Interministériel d’Aménagement et de Développement du Territoire (CIADT) d’été du 9 juillet 2001, à Limoges. Pour les mobiles, 1482 communes sur 36535, ne sont pas couvertes. Aucun des trois opérateurs ne les couvrira s'il n’a pas son retour sur investissement en terme d’abonnés. C’est du marketing, je suis désolé : on est des sociétés capitalistiques et l’on ne se supplée pas aux politiques sur ce sujet. Les politiques en sont conscients, tant pour le “ haut débit ”, pour l'ADSL que pour la couverture des radiotéléphones. Ils ont dit qu’il fallait faire quelque chose. C’est le rôle du service public dont France Télécom n’a plus la totalité de la mission, depuis la dérégulation. Un co-financement devrait donc être décidé pour les mobiles, à la fin de l’année. L’État financera une partie de ce réseau, la collectivité locale et les opérateurs une autre. La forme n’en est pas encore décidée. Concernant l'ADSL, France Télécom n'équipera pas des communes de moins de 2 000 habitants, à plus de 4 km d’un répartiteur. Le législateur réfléchit à cela, sous la réserve que cela soit technologiquement possible. Les politiques se sont intéressés précisément à la question depuis longtemps, et cherchent des solutions alternatives à ces solutions qui ont leurs limites, leurs contraintes physiques. En Bretagne, à Quimper et à Vannes, on a tenté le satellite avec retour par RTC , et le problème d’asymétrie subsiste. Il existe d’autres solutions en zones rurales avec le satellite. Et puis il y a les boucles locales radio.

Depuis le 1er janvier, les opérateurs de boucles locales radio qui ont pris des engagements formels par rapport aux régulateurs, y compris de déploiement en terme de couverture géographique, sont quasiment absents du territoire. En Bretagne, 2 opérateurs nationaux sur 54, ne se répandent que sur les grandes villes. Les opérateurs régionaux sont totalement absents. Le dégroupage de la boucle de cuivre, prévu par la loi, et qui permet à un opérateur de louer le réseau de France Télécom à des prix discutés au niveau de l’Etat, n'existe pas dans les départements du Finistère et du Morbihan. Sur 32 demandes nationales de dégroupage, on ne trouve plus que 7 opérateurs aujourd'hui.

Camille Guillemois: Internet est-il un instrument de la démocratie qui devrait faire partie de l’aménagement du territoire ?

Patrice Desclaud:
En tant que citoyen, je réponds évidemment oui. Mais la réponse financière ne doit pas être celle de l’opérateur. Qu’il donne des solutions techniques pour le faire mais qu’au niveau financier, on pallie l’absence de retour. Par le réseau téléphonique commuté, l’abonnement est limité ; cela est intéressant. Et monsieur Pierret a encore annoncé un abonnement illimité, de l’ordre de 180 F par mois, à l’Observatoire des Télécoms de juin. Cela pose des problèmes techniques évidents. AOL l’a fait, il y a quatre ans, aux Etats-Unis. Le prix de l'abonnement ayant baissé de façon importante, les réseaux de commutation du pays se sont écroulés. Pourquoi ? Parce qu’un commutateur téléphonique a été étudié à l’époque par rapport à une durée moyenne de conversation équivalente à trois minutes. Si vous prenez sur une matrice de connexion d’un commutateur, une liaison de plusieurs heures, il est évident qu'aucune commutation ne passera. On a prévu des surdimensionnements des commutateurs, mais cela coûte et l’on n’en parle plus. En tant qu’opérateur, ce n’est pas moi qui vais pousser ce bouchon en avant mais si les politiques passent à l’acte, on est prêts, on ne le souhaite pas vivement, mais on est prêts.









Mis à jour le 04 février 2008 à 11:27