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1999 : de l’animal à l’homme > TR 4 : alimentation, risques et idées reçues >  Débat de la table ronde 4

Débat de la table ronde 4

Guillaume Roué, Président de Prestor
Jean-François Proust, Comité fruits et légumes
Bernard Chevassus-au-Louis, INRA, Président de l'AFSSA
Paul Lannoye, Député et européen belge
Daniel Gloaguen, Journaliste


Compte rendu :

Transcription :


22 octobre 1999 débat TR4


Débat :


Question:
Vous n’avez pas parlé du problème du gavage des oies et des canards, qui me semble inhumain et barbare.

Guillaume Roué:
Il s’avère que ces oiseaux migrateurs, je pense aux canards, s’auto-gavent avant leur migration, pour survivre lors des milliers de kilomètres qu’ils vont effectuer. L’animal est adapté au gavage. On nous dit aussi que le gavage est réversible, on nous dit qu’un foie hypertrophié peut revenir à une situation normale parce que les animaux y sont habitués.

Jean-François Proust :
J’ai l’impression de m’être trompé de débat parce que dans le programme, je croyais qu’il s’agissait de “Risques et idées reçues dans l’alimentation” à partir de recherches publiées dans le magazine “La Recherche”, je vais citer quelques passages de l’article, à propos de la très large surestimation et à propos du risque des produits phytosanitaires artificiels par rapport aux produits phytosanitaires, produits par les plantes, l’auteur du dernier article, c’est à dire Mr Pascal, Directeur de recherches à l’I.N.R.A., dit les choses suivantes : “Nos responsables politiques évidemment sensibles à l’opinion politique, décident souvent de mesures très coûteuses pour réduire l’exposition de leurs concitoyens au très faible concentration de substance chimique de synthèse. Pourtant leur implication dans l’apparition des cancers chez l’homme n’est toujours pas scientifiquement démontrée. En revanche, aucune grande campagne de promotion de la consommation de fruits et légumes, dans l’efficacité préventive en matière de cancérologie n’est absolument pas contestée, cela devrait être prioritaire. Cette position, sans doute pas très populaire, réclame un indéniable courage de la part des scientifiques, elle me semble la plus efficace pour protéger la santé du consommateur. Moins de démagogie, plus d’efficacité. Mes deux questions sont les suivantes : Avez-vous lu cet article, d’autre part manquez-vous de courage politique dont parle cet article ?

Bernard Chevassus-au-Louis:
J’ai lu cet article, je peux vous en parler. Cet article prône la consommation de fruits et légumes, avec ou sans courage politique dès l’automne prochain on va s’attacher à le faire savoir. Que dit cet article, toutes les estimations de toxicologie sont des extrapolations de quelques expériences à fortes doses qui essayent à partir de là de définir des doses sans effet. On peut discuter, faut-il appliquer ces deux facteurs de sécurité ? Le débat que soulève le Docteur Ames me semble excellent, en deux mots ce qu’il dit, nous savons que la consommation des fruits et légumes a globalement des effets protecteurs sur un certain nombre de cancer du tube digestif. On prétend qu’un certain nombre de produits chimiques pourraient avoir des effets sur les cancers, et à ce titre on met des doses très faibles, ça a pour conséquence que ces fruits et légumes risquent d’être plus chers et donc on freine de fait la consommation de produits qui globalement pourraient être protecteurs, ça c’est un excellent débat. Par contre, n’attaquez pas sur la fixation des doses, ce qui me préoccupe c’est le nouveau facteur de sécurité qui est totalement arbitraire en disant, nous on défend mieux le consommateur. Il y a là une dérive qu’il faut dénoncer, par contre le procès de dire il faudrait remonter les limites maximales ne me plaît pas.

Paul Lannoye:
Je ne suis pas d’accord avec ça, quand vous dites que le principe de précaution est contre-productif par rapport à la santé publique. Je crois que Mr Pascal est très proche des instances européennes, puisqu’il est Directeur scientifique à l’I.N.R.A., et qu’il est Président du comité scientifique directeur de l’Union Européenne. Quand il dit qu’on prend des mesures très coûteuses pour réduire l’exposition de nos concitoyens à la très faible concentration de substance chimique de synthèse, j’aimerais qu’il me cite un exemple concret.

En 1991, on a adopté une directive sur les pesticides au niveau européen et on a confié à tous les États membres le soin de réévaluer les pesticides considérés comme les plus problématiques. Il y en a une petite centaine. On a distribué les tâches aux différents pays, 8 ans plus tard ce n’est toujours pas fait. Parce qu’aucun des États membres n’a mis les moyens pour faire les études. Il s’agissait des pesticides les plus problématiques, venir dire qu’on dépense trop d’argent pour répondre à une demande de l’opinion publique, je trouve que c’est l’inverse qui se fait. Il n’y a aucun lien avec le fait qu’on ne fasse pas de campagne pour la consommation des fruits et légumes, je suis d’accord avec vous. Il faut promouvoir un équilibre alimentaire, il n’y a aucune équivoque là-dessus et tout le monde est d’accord. Pourquoi opposer une attitude rigoureuse sur les produits chimiques par rapport à une campagne sur les bons produits ? Un mot quand vous parlez de vérité, il n’y a aucune vérité scientifique, c’est l’avis de M. Ames, et de lui seul, beaucoup d’arguments sont contradictoires.

Bernard Chevassus-au-Louis:
Le principe de précaution, je ne sais pas ce que c’est dans le domaine de l’alimentation. Il est formulé dans le cadre de l’environnement, c’est la loi Barnier. L’absence de certitudes scientifiques ne dispense pas le décideur de prendre des mesures proportionnées et économiquement acceptables. Quelqu’un comme vous, qui dit, je porte plainte au tribunal administratif parce que j’estime que vous n’avez pas appliqué le principe de précaution correctement, soit parce qu’il était disproportionné, soit parce qu’il a ruiné une filière, peut le plaider. C’est clair, ce qui me préoccupe en tant qu’évaluateur du risque, c’est qu’est-ce que c’est qu’une incertitude scientifique ? Notre recherche au quotidien, elle est bourrée d’hypothèses en cours, de résultats non avérés et autres. Du côté de l’évaluation, qu’est-ce que ça va être le principe de précaution, on pourra vraiment en reparler.

Daniel Gloaguen :
J’ai honte de le dire. Je fais mon travail quand les portes ne se ferment pas comme l’autre jour au ministère où j’en ai fait l’expérience, pour “le Généraliste” revue médicale. Je suis aussi médecin donc je sais de quoi je parle, j’écris aussi pour “Le Paysan breton”, je m’intéresse aussi à l’agriculture et à la nutrition. M.Champagne a fait une attaque en règle contre les journalistes, c’est quand même parce que le journaliste informe que l’opinion se réveille et que les ministères bougent, jamais le contraire. La 1ère revue qui a sorti quelque chose sur les O.G.M., c’est 60 Millions de consommateurs en Janvier 1998, l’histoire des pistaches qui en contenaient, l’histoire que ceux qui les fabriquent n’en étaient même pas au courant etc. Revenir sur la nécessité de dire ce qu’est l’O.G.M., car pour bon nombre l’O.G.M., souvent c’est le maïs. Autre élément, dans le Quotidien du médecin, on mentionne le fait que les Écossais, (ils ont des sacrés chercheurs), cultivent du whisky transgènique et on mentionne l’histoire de la brebis... On relate qu’il y en a un qui s’est rendu compte que les pommes de terre génétiquement modifiées pouvaient altérer les muqueuses de rats. Je voudrais aussi ajouter pour conclure, je suis scientifique et je suis médecin, il y a une chose que les gens ne supportent pas, je le vois avec mes patients, c’est le fait qu’on puisse dire : “Je ne sais pas”. A une époque où le progrès fait des choses extraordinaires, on prend par exemple, des spermatozoïdes d’une personne qui est décédée, on les met à congeler, on les ressort 30 ans après, on les met dans un ovaire de la grand mère de la personne qui est décédée, on les met ensuite dans un utérus etc., ou cette histoire de gamin qu’on opère à 4 mois dans le ventre de sa mère parce qu’il a un problème de transposition de vaisseaux , l’enfant naît, il est en pleine santé, 20 ans plus tard il est champion olympique, alors quand une mère vient aux urgences avec un gamin qui a mal au ventre et qu’on dit : “Je ne sais pas”, on n’est pas pris au sérieux. Dire : “Je ne sais pas” est insupportable et j’ai le sentiment que pour les organismes génétiquement modifiés, on ne sait pas.





Mis à jour le 05 février 2008 à 17:19