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Questions du public

Brigitte Bornemann-Blanc, 3B Conseils
Max Jonin, UBO
Public
Élisabeth de Fontenay, philosophe

Compte rendu :

Transcription :


23 octobre 1999 TR7

Questions du public :


Public: Le citoyen n’a pas eu le temps de s’exprimer !

Brigitte Bornemann-Blanc:
C’est un vrai reproche que vous pouvez nous faire. Les entretiens sont ouverts à tous et ils sont gratuits. Quels sont les moyens d’information que nous avons pour vous prévenir de la tenue des entretiens scientifiques. Nous fonctionnons de trois façons. D’abord, sur le plan régional un pré-programme a été édité et diffusé à 18 000 exemplaires, il a été diffusé par l’intermédiaire de la revue Réseau, par le fichier de la librairie brestoise “Dialogues”. Il est également envoyé aux élus. Il y a un très gros travail qui est fait sur le site internet par l’intermédiaire de l’Université de Bretagne Occidentale, par France-Telecom et par l’E.N.S.T. de Bretagne. C’est le premier niveau d’information, le deuxième niveau d’information que nous avons c’est par les médias : Ouest-France. Le Télégramme. Le paysan Breton. Le courrier du Léon. Ces supports annoncent les entretiens scientifiques, ils les annoncent dans le cadre rédactionnel. Vous avez Radio France, Radio-Bretagne Occidentale, FR3 qui annoncent les débats. Cette année, on a eu 5 heures d’émission sur France Culture, il faut aussi que les uns et les autres, on puisse se tenir informer. Il y aussi le journal de la Mairie de Brest qui s’appelle “Sillage” qui a passé une information dans le numéro d’Octobre pour annoncer les Entretiens scienti-fiques. Il faut s’y inscrire, car comme vous l’avez remarqué, la salle n’est pas très grande, il y a 300 personnes. Pour installer une manifestation dans une ville, il faut du temps, nous avons 3 ans, c’est tout un effort que nous devons faire et des rencontres que nous devons organiser avec l’Université du temps libre, avec Nicole Priol de l’A.P.B.G.. Le temps du débat, on travaille sur 24 h, ce sont des entretiens qui se déroulent sur deux jours. On a toujours cherché à être sur une thématique la plus large possible. Pour couvrir les problèmes d’actualité, dans le temps qui nous est imparti, on cherche dans chaque débat à ce que toutes les parties puissent être présentées. Il y a beaucoup d’inter-venants. Soit on choisit d’être moins large et on laissera plus de temps pour que le débat s’installe dans la salle.

Public:
A propos de l’éthique, est-ce que l’éthique a sa place dans le domaine de la science ou est-on, là pour savoir comment l’éthique et la science s’accrochent ?

Max Jonin:
Professeur à l’U.B.O. et à S.A.E.P.B.. Le chercheur doit chercher en toute indépendance et liberté mais par ailleurs le chercheur est aussi un citoyen, il a sa pleine place dans la cité pour sa réflexion, prolonger son travail de laboratoire dans sa vie de citoyen.

Élisabeth de Fontenay:
Je vais vous faire un aveu, je suis en fin de carrière, j’ai fait de la philosophie toute ma vie. Et c’est maintenant que je ne sais plus répondre à cette question. Je ne peux que vous renvoyer à l’admirable livre de Paul Ricoeur, le philosophe et Jean Pierre Changeux qui s’appelle “La nature et la règle” paru chez Odile Jacob, il essaye d’enfoncer la thèse d’une morale qui serait ancrée dans la nature, se rattachant à une thèse qui est celle de Darwin, qui a expliqué ce moment de l’évolution qu’est l’homme, c’est un moment très particulier, parce qu’alors qu’avant l’homme, les autres espèces éliminaient les êtres faibles qui pouvaient nuire à l’expansion, à la propagation de l’espèce. Avec l’homme nous avons affaire, dit Darwin, à des êtres vivants qui protègent les malades, qui protègent les infirmes. J’ai envie de me rattacher à ça, parce que je suis matérialiste et je ne veux pas que l’on me fasse le coup de la transcendance. En face, il y a Ricoeur qui réfléchit beaucoup sur le livre de Jonas, qui a pour titre le “principe-responsabilité”, et sur un livre qui n’est pas traduit qui s’appelle ”The phenomenon of life” le phénomène de la vie. Dans ce livre, Jonas montre que la norme est déjà immanente ou inhérente aux vivants, mais qu’évidemment quand elle parvient à l’homme, il y a une sorte de saut qualitatif. Ricoeur bien que disciple de la phénoménologie vitaliste de Jonas, Ricoeur essaye de défendre une sorte de transcendance de la norme, il n’accepte pas qu’on dise que la norme se fonde dans la nature. Philosophiquement , c’est évidemment indéfendable de dire que le : “tu dois” s’inscrit dans le “cela est.” On ne peut pas dériver le devoir ou l’obligation, de la nécessité de ce qui est, ce sont des catégories fondamentales Kantiennes, l’opposition de l’ordre à la nécessité, l’ordre de l’obligation. Je crois qu’il faut quand même défendre l’idée de la transcendance de la norme parce que c’est ça qui sauve, cette universalité dont je parlais.

Regardez quand on fait la critique des moeurs chinoises, les chinois nous disent, fichez-nous la paix ! C’est notre culture. Regardez ce qui se passe quand nous faisons la critique de l’excision qui est pratiquée par certaines tribus, les ethnologues qui les connaissent bien nous disent, laissez-nous tranquilles, laissez-les tranquilles, ça fait partie de leur tradition, de leur culture, ça fonctionne dans un système, vous n’avez pas à ériger vos normes occidentales. C’est toujours ce qui me fait peur, nous érigeons notre décalogue et notre évangile, tel qui ce sont laïcisés dans la philosophie des lumières, dans les doctrines des droits de l’homme, j’ai toujours peur que nous érigions nos principes occidentaux en normes universelles, mais en même temps, je ne suis pas du tout prête à renoncer, à l’idée d’universalité. Je ne peux pas répondre mais je trouve qu’on va plus loin en ne répondant pas qu’en répondant.